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Le Siècle, 28 mai 1907

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Le Siècle
28 mai 1907


Extrait du journal

Paris a eu hier une belle journéeÎ3ans cette saison, où le printemps l'inonde de lumière et de beautés, aux quelles les plus vieux Parisiens ne sont pas en core habitués et qu'ils voient renaître chaque année avec un étonnement et un émerveillement nouveaux, la République a reçu un couple royal jeune et charmant, représentant une des plus vieilles -dynasties du monde et une des plus loyales nations de l'Europe. Et la réception a été empreinte d'élégance, de magnificence et de richesse, que ne déparaît point l'étalage d'une force militaire disciplinée.. . A voir ces uniformes brillants, ces troupes impassibles, le respect que cette foule choisie témoignait au .chef de l'Etat et l'aisance avec laquelle ce dernier accomplissait une partie vrai ment royale, de ses hautes fonctions, on n'eût jamais dit que cette -République brillante* luxueuse, pimpante et bien ordonnée porte ac crochés à ses flancs des traits qui la font sai gner ; et entre autres la colère du monde du travail, égaré par les fumistes sonores qui ne font jamais gTève quand il s'agit de désunir les cœurs et d'affaler les cerveaux ; un parti socia liste, que lai surenchère électorale et le besoin de conquérir les éléments révolutionnaires trans forment eh héritiers de la Commune, et qui a cru intelligent de manifester la veille sur la tombe de ces malheureux fédérés qui avaient absorbé, eux aussi, des discours au moins pa triotiques ceux-là, mais empoisonnés par l'am bition des meneurs et arrosés de cette quantité prodigieuse d'alcool que renfermait Paris, et dont on n'a peut-être pas assez étudié le rôle dans la naissance de la Commune. Il est vrai que cette cérémonie de haine a amené un incident qui prouve par quelles pro fondes Tacines tient encore l'amour de l'ordre dans notre société. Un député socialiste, a été arrêté pour refus de circuler. Il s'est plaint. Un autre député a riposté : u Moi aussi, j'ai été arrêté, et je ne me plains pas, parce que les dé putés n'ont pas plus de droit au désordre que les simples citoyens. » Et la Chambre a voté l'ordre du jour pur et simple, admettant la théo rie des amis du député arrêté, que cet ordre du jour a prouvé cette arrestation. Enfin, qui aurait pu se douter, devant cette réception royale, que le Midi, notre bon Midi, veut se séparer de nous, parce que nous n'arri vons pas à lui boire tout son vin, et qu'il circule dans ses cités historiques en colportant des petits cercueils, des guillotines qui fauchent des petites têtes, pour indiquer le sort qu'il réserve aux fraudeurs, et en mariant des inscriptions ardemment révolutionnaires, avec un ordre et une tranquillité vraiment louables ? Un étranger, à qui l'on aurait montré la capi tale hier et auquel on aurait raconté tous nos chagrins, aurait certainement répondu : Con solez-vous ! Ce n'est pas sérieux- Et je crois comme l'étranger que ce n'est pas sérieux. J. Cornôly. i' 1 ■ mmimtm i i ' m- Mmtions Politiques et Parlementaires...

À propos

Fondé en 1836 par Armand Dutacq, Le Siécle bouleversa la presse française grâce à une stratégie éditoriale révolutionnaire pour l'époque. Comme La Presse de Girardin, fondée la même année, ce quotidien fixa son prix d'abonnement à 40 francs – c'est-à-dire la moitié de celui des autres journaux – et entrepris de compenser cette somme modique par d'autres revenus, tirés de la publicité. Traditionellement anticlérical, il deviendra l'organe de la gauche républicaine pendant une grande majorité de la Troisième République.

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