Extrait du journal
des de calme, l'on ne doit songer qu'aux progrès méthodiques et aux améliora tions rationnelles. On a établi, cette année, la péréqua tion et la quotité pour l'impôt sur la propriété bâtie. Voilà une réforme. Nous demandons un crédit pour expérimen ter la revision cadastrale. Voilà une autre réforme. Est-ce à dire cependant que ces changements, si heureux qu'ils puissent être, ou toutes autres modifi cations qu'on pourra'réclamer dans l'assiette de l'impôt, suffisent à assurer l'équilibre sérieux du budget ? Ce qui s'est passé au mois d'août, hélas! prouve bien le contraire. Nous avions voulu faire rendre à l'impôt sur la propriété bâtie, quelques millions de plus qu'il ne donne aujourd'hui. Nous demandions simplement qu'en moyenne les maisons fussent aussi frappées que les terres. C'était une mesure de justice et d'égalité. Elle a été repoussée. On avoté la péréquation, on n'a pas voté le relèvement. Il en sera de même demain lorsqu'on remaniera l'assiette de tel ou tel autre impôt : on trouvera toujours des raisons ou des prétextes pour ne pas rehausser le total de la recette. M. Léon Say parlait de ce médecin qui se chargeait de faire porter 300 ki logrammes par un seul homme, à la condition de bien répartir la charge. MM. Millerand et ses amis sont plus forts que ce médecin. Ils veulent, com me nous, mieux répartir la charge, mais ils s'imaginent qu'il suffit de la mieux répartir pour l'augmenter. C'est là que je ne les comprends plus. A supposer, d'ailleurs, qu'une fois les impôts mieux répartis, on réussisse à leur faire produire davantage, je tiens qu'il faut commencer par vivre et par se bien porter, avant de se mettre à marcher.Personnellement, je ne me mé fie pas des réformes de MM. Jamais, Maujan et Millerand. Mais d'autres s'en méfieront, qui diront : < Prenez çarde ; vous allez diminuer les ressources du Trésor ; si vous modifiez tel impôt, vous allez creuser le déficit ». Et dans la crainte de déranger l'équilibre, on ne voudra toucher à rien. La plus sûre manière d'obtenir des réformes, c'est de s'assurer d'abord contre les risques des expériences nouvelles. A cela, M. Jamais répond : « C'est précisément dans une heure de gêne que l'Angleterre a trouvé l'instrument de sa richesse. » Oui. Mais il oublie que Yincome tax, lorsque Pitt le fit, pour la première fois, établir en 1798, était une taxe additionnelle greffée sur une con tribution plus ancienne. Il oublie qu'en 1799, après avoir essayé de créer un impôt unique sur l'ensemble du revenu, l'Angleterre fut forcée de renoncer à pette combinaison ; que le premier in carne tax, supprimé après la paix d'Amiens, avait laissé un arriéré très considérable et que c'est sous forme d'impôt de superposition, multiple et morcelé, qu'il a été, à plusieurs repri ses, rétabli et modifié. L'Angleterre n'a pas substitué un régime à un autre; elle a complété l'édifice de ses impôts par un étage mobile, qu'elle relève, abaisse ou supprime à son gré; et l'exemple invoqué par M. Jamais se retourne pré cisément contre sa thèse. Il faut aller au plus pressé, et le plus pressé, c'est de trouver 83 millions pour incorporer le budget extraordinaire de la guerre. Or, s'il est avéré que les véri tables économies, les économies dura bles, ne peuvent être improvisées,; qu'elles doivent résulter de la simplifia cation du mécanisme administratif ; qu'on n'en peut, par conséquent, re cueillir en un jour le complet bénéfice ; qu'il faut avoir la patience de les semer et de les laisser mûrir avant de les moissonner, il devient nécessaire, pour arriver à ces 83 millions, d'ajouter aux réductions actuellement possibles des impôts nouveaux. M. Léon Say n'aime pas les impôts de la commission; il préférerait une surtaxe sur l'alcool. C'est-à-dire qu'il préférerait le projet de M. Rouvier à celui de la commission. M. Léon Say est plus ministre des finances que le ministre lui-même; c'est très bien à lui. Quant à nous, nous ne cachons pas que l'essentiel, à nos yeux, c'est l'incorporation. Nous tâcherons, dans de prochains articles, d'expliquer pour quoi la commission du budget a mo difié le projet primitif du gouverne ment. Je crois qu'elle a bien fait. Mais la clef de voûte du budget de 1891 est la suppression du budget extraordinaire de la guerre. Je n'irai pas jusqu'à diré comme le décadent Verlaine ; « Tout le reste est littérature ». Mais tout le reste est secondaire et doit s'effacer devant l'urgence de cette nécessité financière. Raymond Poincaré. m décision'contestable La commission parlementaire du travail a pris, dans la séance qu'elle a tenue hier, une résolution dont la portée bienfaisante n'égale peut-être pas la gravité. Elle a dé cidé de poursuivre une enquête en province, dans les principaux centres industriels, sur la question de la délimitation des heures de travail des ouvriers adultes. Que la commission, en une matière aussi délicate, s'efforce de réunir tous les rensei gnements utiles et fasse appel aux intéres sés eux-mêmes, nous n'y trouvons rien à redire. Aussi bien l'enquête parisienne a telle donné des conclusions trop favorables à la thèse de la liberté, pour que nous n'ayons pas une entière confiance dans le bons sens réfléchi des populations ouvrière» de la province- Mais la nécessité ou l'utilité de l'enquête reconnue, la commission du travail a-t-elle choisi le moyen le plus pra tique et le moins dangereux d'y procéder ? Voilà ce que nous ne pouvons croire. L'enquête, à Paris, s'est faite par corres pondance, à l'aide de questionnaires aux quels l'ouvrier consulté pouvait répondre. En province, elle s'effectuera devant une commission de six députés, revêtus de leurs insignes, avec solennité, avec appa rat. Différence peu justifiable. N'était-il pas, au contraire, plus facile de poursuivre à Paris une enquête orale ? Commissaires enquêteurs et déposants se trouvaient rap prochés : moins de perte de temps, moins de frais, moins de majesté imposante de la part des uns, moins d'illusions de la part des autres. Pourtant la commission, sur l'avie du gouvernement, eut la sagesse d'y...
À propos
Fondé en 1836 par Armand Dutacq, Le Siécle bouleversa la presse française grâce à une stratégie éditoriale révolutionnaire pour l'époque. Comme La Presse de Girardin, fondée la même année, ce quotidien fixa son prix d'abonnement à 40 francs – c'est-à-dire la moitié de celui des autres journaux – et entrepris de compenser cette somme modique par d'autres revenus, tirés de la publicité. Traditionellement anticlérical, il deviendra l'organe de la gauche républicaine pendant une grande majorité de la Troisième République.
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