Extrait du journal

DEUXIÈME PARTIE LIVRE DEUXIÈME Les Vagabonds I. — La rencontre Autour de ces deux étranges vagabonds Î[ue la fatigue venait d’asseoir dans le ossé du chemin, s’étalait, dans la grosse chaleur du jour, le grand silence des bois. Au loin seulement, un coucou perdu dans les feuilles faisait entendre à inter valles réguliers son appel monotone et doux. — Oui, nous en avons vu de dures, reprit l'homme, songeusement et le regard fixe, comme se parlant à lui-même... Quand on pense qu’il va y avoir sept mois que nous sommes partis de là-bas 1... Quelle sacrée vie, depuis!... Ce naufrage, d’abord, qui nous a fait at terrir en Angleterre quand nous allions à Bordeaux... ïe vaisseau qui nous a recueillis faisant route pour Liverpool et n’ayant pas consenti à modifier son itinéraire... Ah l ces Anglais !... Puis ce vol qui nous a raflé nos dernières ressources 1... ün m’a volé, moi !... Il serra les poings, écrasa un sourd juron entre ses mâchoires, puis continua : — Te rappelles-tu, nein, notre arrivée en Hollande?... Plus un sou, à peine de quoi nous cou vrir... Une de ces situations à perdre tout cou rage, à se flanquer la tête la première dans la mer, pour en finir... Et puis ces semaines passées à errer dans les campagnes ; ici, travaillant avec les pay sans, là, aidant les ouvriers. Quelle vie 1...