Extrait du journal

soustraire aux dangers de la quand la patrie était menacée. Au contraire, avec le système du coloI nel Girard, le remplacé, après avoir payé sa dette au pays par son année de ser vice personnel, passerait dans la dispo nibilité. Le jour de la mobilisation, il marcherait pour son compte, en même temps que son remplaçant pour le sien. , I.e remplacement dans ces conditions, dit le colonel Girard, offrirait l’avantage de permettre aux jeunes gens qui n'ont pas de goût pour le métier des armes de le quitter une fois qu'ils auraient rempli l'obligation de servir pendant un an, en même temps qu'il donnerait à ceux qui aiment le service militaire la possibilité d’y rester et qu’il procurerait, d'autre part, à bon nombre d’hommes qui quittent le service sans savoir quoi entreprendre et qui, souvent, incapables de se débattre dans la lutte pour la vie, seraient exposés peut-être à de venir des déclassés, le moyen de conserver une place honorable dans la société en restant dans l’armée. Ce système donnerait la possibi lité d’avoir des «> professionnels •> sans qu’il en coûtAt un liard à l'Etat, et, si la loi accordait la faculté au même individu de remplacer pen dant plusieurs périodes successives de deux ans. de conserver ces professionnels pendant longtemps sous les drapeaux. Le système du colonel Girard vaut la peine d’être examiné par le ministre de la guerre et par le conseil supérieur de la guerre, quand nous aurons retrouvé la tranquillité et qu’on laissera les gens sérieux s’occuper sérieusement des vrais intérêts de l'armée, qui sont ceux du pays lui-même. L’armée est l’instrument vivant de la puissance du pays : Il faut donc que l’ins trument soit aussi fort que possible.Four qu'une armée atteigne le maximum île sa force, il faut qu’elle ait le nombre et la qualité. On obtient l'un et l’autre en ayant un cadre très bien constitué de professionnels, dans lequel on fait passer toute la jeunesse valide, pendant le temps nécessaire pour l'instruire. L’ancienne armée, celle de Louis-Phi lippe et du second Empire, était organi sée sur la base du service de sept ans avec le remplacement. Elle avait la qua lité aux dépens du nombre. La nouvelle armée, celle du service de trois ans et de la dispense conditionnelle d’un an, a le nombre aux dépens de la qualité. Avec le système de recrutement d’autrefois, le cadre était excellent, mais on n"avait pas assez d’hommes à y mettre. Avec le système de recrutement d’aujourd’hui, nous avons assez cl même trop d'hom mes à encadrer . mais c’est le cadre qui est aminci au point de courir le risque de se briser. Le système proposé par le colonel Gi rard nous permettrait d’avoir le cadre solide et résistant d’autrefois et d’y en fermer toute la force vive du pays. 11 nous rendrait tous les avantages de la loi militaire de 1832, en nous laissant tous ceux de ta loi militaire actuelle.En fin il concilie d’une manière très heu reuse l’intérêt social et celui de la dé fense du pays. J’espère donc que le système proposé par le colonel Girard ne passera pas inaperçu et qu’on trou vera le moyen de s’en occuper quand on aura liquidé l'affaire Dreyfus. Car enfin, que le capitaine Dreyfus soit condamné ou acquitté par le conseil de guerre de Rennes, dans l'un ou l'autre cas la terre continuera de tourner, la France conti nuera de vivre et l'on ne pourra pas continuer n passer son temps à crier, les uns : « Mort aux Juifs ! » et les au tres : v A bas les généraux! » Un devra passer à d’autres exercices. Suivant un mot célèbre, quand on en mira fini avec l’affaire Dreyfus, sur la quelle sc sont greffées tant de questions complexes et irritantes, il restera la France ; et il faudra bien que la France retrouve sa vie normale, avec le gouver nement actuel ou avec un autre. Hervé de Kcrohant...