Extrait du journal
Le poète Maurice Bouchor doit le tenir encore en certaine pitié et le prendre pour un végétarien pour rire, lui qui ne transige pas avec la doctrine et passe, incorruptible, devant toutes les bouche ries de Paris et les abattoirs do la Villette. Si ça prenait, ça serait le bon temps pour la légume, comme il se dit couram ment dans les marchés de Paris et dans toutes les campagnes maraîchères de France ; mais j’ai bien peur que ça ne prenne pas. Francisque Sarcey a le tort de s’y mettre un peu tard, et il en aura moins de mérite. C’est à l’âge do l’appé tit quand même qu’il faudrait faire de ces expériences-là, parce que l’on y au rait plus de vertu,et que le résultat serait aussi plus probant. Ces petites fantai sies de nourriture ne datent pas do loin, et les savants ne les envisagent point de la même manière. Vivez de légumes, di sent les uns, et buvez de temps en temps un verre de bon vin ! Mangez simplement et éternellement des viandes grillées, disent les autres, et ne buvez que de l’eau. Surtout ne buvez pas en mangeant, c’est tout ce qu’il y a do pire ! Et voilà comment nous pouvons con naître des gens qui mangent sans boire et qui, disent-ils, s'en trouvent très bien. Il parait que M. Zola no boit que de l’eau, et encore pas beaucoup. La chro nique, qui s’occupe de sa sauté autant que de ses livres, affirme qu’il a perdu un certain nombre do kilos et qu’il est devenu presque svelte. L’auteur des Rougon-Macquart n’a plus de bedon, et le critique dramatique du Temps com mence à perdre thi ventre. Mais Sarcey est tout de môme moins sectaire : il en tient encore pour l’œuf à la coque et quelquefois pour le poisson. Il ne recule même pas devant quelques tasses de bon café ; mais il a proscrit son petit verre d’eau-de-vie. Il y reviendra, et je crois qu’il aura bien raison. Une chose l’encourage, c’est que la science lui affirme qu’en procédant do la sorte il évite un nombre considérable de maladies dont les moindres seraient la goutte et la gravelle, sans compter un tas de petites affections secondaires qui n’ont rien d’agréable, loin do là. Mais, d’un autre côté, il y a les maladies de foie, le diabète, et ceci et cela, qui n’ado rent pas précisément les légumes et les féculents. Aussi bien, je crois que le plus sage est de vivre sans excès, comme on vivait jadis, à moins d’une envie irré sistible de se singulariser, et surtout de faire crier par-dessus les toits qu’on se singularise. Le végétérianisme, j’y con sens, est un système de nourriture, mais je croirais volontiers qu’il agrée à ceux qui ne veulent plus inviter personne à dîner. Je me suis laissé dire que, dans la demeure de Sarcey, la table était large ment hospitalièSi re. notre célèbre con frère devient strictement végétarien, c’en serait donc fini do l’hospitalité ? Il faut pousser la doctrine jusqu'au bout. Jean de Nivelle....
À propos
Fondé en 1873 par Édouard Hervé, Le Soleil était un quotidien conservateur antirépublicain. Avec son prix modique, il cherchait notamment à mettre la main sur un lectorat populaire, audience qu'il n'arrivera toutefois jamais à atteindre du fait de ses orientations politiques. Le succès du journal fut pourtant considérable à une certaine époque, tirant jusqu'à 80 000 exemplaires au cours de l'année 1880.
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