Extrait du journal

Hélas ! hélas ! trois fois hélas I Il faut qu’à la fin je m’épanche, Car je vois que je branle au manche Et que le patron se fait las. Depuis qu’il a taillé sa barbe Et mis de l’ordre en ses cheveux, 11 devient maussade, nerveux. Il lui faudrait de la rhubarbe, Pour rafraîchir ses intestins ; Mais, dédaignant toute recette, Il ne fait plus jamais risette A ses amis les plus certains. Dès qu’il m’aperçoit, il s'éloigne Ou passe tout droit, sans broncher • Je ne suis plus son cher Tissier, Et mémo il dédaigne ma poigne. Il ne sc souvient plus des pains * Que j’administrais, sans mesure, Bans la poitrine ou la figure Des amiraux les plus rupins, Quand ils venaient au ministère Exposer des griefs fictifs. Ces gens par trop décoratifs, Méprisant les hommes de terre Croyaient que, pour bien naviguer Et faire de bonne besogne, Il ne faut se rougir la trogne, Ni craindre de se fatiguer, Mais boire de la camomille; Au lieu du Pernod généreux, , Cet élixir des malheureux, Ce qui fait rire Camille. Aujourd’hui, Ton n’en est plus !S; Le patron sc rase et se frise ; Sam son ne veut plus qu’on se grise J Il a rencontré Dalila ; Et sa force d’an tan connue, Par les grands chefs les plus fameux. Depuis quelques jours désastreux, Avec ses poils est disparue. Hélas ! Que vais-je devenir ? En proie aux plus vives alarmes, Je n’ai plus qu’à verser des larmes Sur un bonheur qui va finir. Et je retourne à ma charrue Comme le vieux Cincinnatus, Loin des gens, hier mal vêtus, Qui changent soudain de tenue. Et je dirai, dans un bouquin Très documenté, qu’un ministre Qui s’embaume et se calamistré, N’est plus digne du maroquin. Jean de Nivelle. — A la Chambre...