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Le Temps, 1 juillet 1887

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Le Temps
1 juillet 1887


Extrait du journal

n’avaient le droit ni la puissance d’empêcher ces deux êtres libres et raisonnables de se dire ce qu’ils pensaient : le devoir de ceux qui les aimaient était maintenant de se tenir prêts à les consoler lorsque la vie leur aurait porté le coup terrible qu’elle leur tenait en réserve. Dans ce salon d’hôtel, banalement meublé de velours rouge, éclairé. par ' deux lampes aveu glantes, ils se trouvèrent seuls, face à face ; tous deux jeunes et beaux, élégants et sveltes, personnifiant leur race, dévorés tous les deux d’une inextinguible soif d’honneur et de vérité. — Lydia, dit le jeune homme de sa belle voix grave. Vous avez passé tout le jour loin de moi, et j’ai appris ainsi que je ne pouvais pas vivre séparé de vous. Elle ne détourna point son clair regard d’hon nête femme, qui s’adoucit seulement et se rem plit de tendre pitié. — Je sais qui je suis, reprit-il, je sais qui "vous êtes, je sais tout ce qui nous sépare. Hier encore je n’y pensais pas ; c’est aujourd’hui, loin de vous, que j’ai eu le temps de réfléchir et de me rendre compte... Toute la journée j’ai marché seul, je ne sais pas où j’ai été; la pluie que le vent me cinglait au visage me fai sait cruellement plaisir ; j’aurais voulu que ce fût des cailloux et que mon .sang coulât sousleur morsure... J’ai été fou de rage pendant un moment. Je me suis calmé, depuis ; vous voyez que je vous parle très tranquillement. Elle continuait, à le regarder de ses beaux yeux, pleins de miséricorde. — Dieu m’a abandonné, reprit-il ; je l’avais pourtant cherché de toute mon âme ; je me suis demandé pourquoi ; je ne sais pas ! Il baissa la tête et sembla regarder au fond de lui-même avec une tristesse- amère. Elle fit un. léger mouvement ; le frôlement de sa robe tira Nikanor de sa méditation. — Vous m’êtes devenue nécessaire, reprit-il sous le regard compatissant. Peut-être n’estce pas uniquement ma faute; vous avez été trop bonne, trop affectueuse ; vous m’avez té moigné trop de sympathie... — D’admiration, interrompit Lydia d’une voix calme. Il écarta ce mot d’un geste de la main. — J.e me suis laissé prendre... Est-ce par l’orgueil? . — Non, répondit-elle. * . — Alors, à je ne sais quel autre piège de Sa tan... ou plutôt, si... je le sais bienl Mais mon âme est liée maintenant : je n’ai pas songé à lutter lorsqu’il en était temps; aujourd’hui, pris par surprise, je n’en ai pas le pouvoir. — Pourquoi lutter? fit Lydia. Il la regarda, étonné. Dans les yeux de la I jeûné femme rayonnait une tendresse lumi...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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