Extrait du journal

' LETTRES DE LA PROVINCE Tous me saurez gré de continuer de vous tenir aù courant de l'impression pro duite parle message du maréchal. Je ne peux pas encore parler pertinemment de ce qùe pensent les “populations rurales; bien, que le message soit- affiché dans toutes les communes, il s’en faut de beau coup qu’il ait été lu ou entendu de la plu part des électeurs. Ce qu’il est aisé de pré voir, c’est que cet appel plébiscitaire, avec ses termes élastiques et équivoques, avec sa portée indéfinie et ses menaces ex plicites, répandra dans l’esprit populaire tout autre chose que la lumière et le calme. Il me revient de divers côtés que le premier effet produit est loin d’ôtre un effet tragique. Ceux qui ont écrit ou ins piré le message n’ont évidemment pas songé qu’il y a des inconvénients à trop dépasser les justes bornes, soit dans i’éloge, soit dans l’invective, quand on veut être pris tout à fait au sérieux; ils n’ont pas considéré surtout que le genre de. l'in timidation officielle a ses règles et ses limi tes naturelles. Aussi beaucoup do gens, au lieu de voir dans ce document une preuve de force et de résolution, sont frappés au contraire comme d’uu signe de faiblesse de ce qu’il y a d’excessif et de violent dans le langage. Ce n’est pas de ce ton-là, disent-ils, que s’expriment des hommes d’Etat sûrs de l’opinion, ou, à défaut de l’opinion publique, sûrs d’eux-mêmes et de ce qu’ils feront le lendemain. Dans le public intelligent l’impression est aussi mauvaise et aussi générale qu’il est possible de l’imaginer. Il faut rendre cette justice aux habiles metteurs en scène du 16 mai qu’ils réussissent depuis trois mois à susciter chez tout ce qui garde en France quelque lucidité de raison et quelquelque fierté libérale . un merveilleux crescendo d’indignation. Sommes-nous en-...