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Le Temps, 2 juin 1900

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Le Temps
2 juin 1900


Extrait du journal

lise rapprocha vivement d’un élan avec cette fougue qu n mettait dans tous ses mouvements, la saisit aux épaules èt, avant de l’embrasser, la renversa légèrement sous l’abat-jour pour mieux examiner son visage : — C’est vrai que te voilà toute pâlotte !... Et que ton cœur bat;.oh ! comme il bat, je l'en tends !... Te faire peur, moi, bien-aimée I... Oh! je donnerais ma vie pour t’épargner une peine, et ce ne serait pas encore assez pour m’acquitter de tout ce que je te dois !... Je te dois plus, que l’existence, je te dois ce que je suis... Te faire peur !... Aimée, va, te faire toute la joie possible voilà ce que je veux ! Déjà ses lèvres couraient sur le front, sur les tempes, sur les joues, comme pour les réchauf fer, les ranimer, leur infuser ce sang jeune et fort, qu’il lui devait à elle, et qui devenait ainsi une restitution deTenfant à la mère. Elle fit, s'abandonnant à ces caresses : — Je ne t’ai pas entendu entrer, pas même sonner; alors, tu comprends* la surprise ! Il l’enveloppait plus tendrement de ses bras, ajoutant gaiement : " v — Hou ! C’est qu’un avocat ça représente tou jours un peu la Justice, la Cour d’assises, et que dame, quand on a un passé , comme le tien, on n’a pas la conscience tranquille!... C’esttoujours ainsi !... Ah! ah! ah!... Pauvre maman, va ! Je te fais enrager !... Subitement elle s’était faite plus lourde entre ses bras, la tête pesant davantage, lé corps comme abandonné, inerte. Il crut à une câlinerie plus accentuée, à un . excès'de maternité tendre et redoubla sa plai santerie : — Une vraie criminelle, bonne aimée 1 Et, de son accent naturel : —' Ah ! s’il n’y en avait que comme toi, la pro fession d’avocat serait peu fatigante ! Un tressaillement si profond la secoua qu’il ne put faire autrement que de le remarquer. Il s’inquiéta : — Certainement tu auras pris froid ; voilà que tu frissonnes !... Et moi qui riais, oh ! je m’en veux!...' Il essaya de se dégager de l’étreinte dont elle l'avait entouré pour répondre à la sienne : — Allons, que je voie un peu; est-ce qu’on n’aurait pas été sage aujourd’hui? Il prit une voix d’affectueuse gronderie: — Tu seras sortie sans te couvrir suffisam...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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