Extrait du journal

— La princesse vous attend, répondit le prince, mais j’espère qu’avant toute chose vous allez déjeuner! — Non, non, laissons cela. Et ta nièce? — Elle va bien, merci. — Chère petite ! toujours belle et bonne ? — Cher comte ! soyez le bienvenu chez moi ! s’écria en français la princesse Aglaé qui s’était précipitée à sa rencontre. Mais, se souvenant aussitôt que le cher comte ne parlait ni ne comprenait aucune langue étran gère, elle prit le parti de l’inviter à déjeuner en russe. . — Grand merci ! Je ne déjeune pas. Je re viendrai pour la fête de cette jolie mignonne... Ah ! chère enfant ! ajout-' t-il allant vivement à Lina qui entrait, le bon Dieu bénisse votre joli visage ! Lina lui fit une profonde révérence, mais il prit sa main fluette dans les siennes, aussi grasses que celles de l’archiprêtre d’une riche paroisse, et la serra paternellement. — La fauvette est ici, elle aussi, psalmodia-t-il en reconnaissant Olga, qui avait suivi Lina et qui dardait sur le gouverneur ses œillades les plus assassines. Toujours notre jolie voix, hein? Et toujours le même œil fripon I Dis à ton père que, s’il, continue à jouer gros jeu comme il fait, je me fâcherai... — Votre commission sera faite, Excellence, dit Olga avec un regard hardi autant qu’expres sif. — Très bien, et qu’il ne l’oublie point. Mais ne bavardons pas. Hâtons-nous, Larion. — J’ai envoyé la réponse telle que je l’ai re çue, disait le comte, assis dans la bibliothèque, bien enfoncé dans un large fauteuil Voltaire, ' ses petites jambes croisées l’une sur l’autre. Il ressemblait ainsi à s’y méprendre à un véri table Vichnou. — Ai-je le bonheur d’avoir votre approba tion? — Du moment que tu as écrit selon ta con science, je ne puis qu’approuver. — Je n’accepterai jamais une position, si haute qu’elle soit., qui me mettrait «o cnntact, avec la police....