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Le Temps, 6 juin 1876

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Le Temps
6 juin 1876


Extrait du journal

Abd-ul-Aziz s'est ouvert les veines, et on l'a trouvé mort, hier matin, dans le palais où il était retenu; les funérailles du sultan déchu ont été faites dans l'après-midi, avec la pompe accoutumée; Abd-ùl-Aziz repose maintenant près de l'hippodrome de Septime Sévère (At-Meidan), dans le turbé du sultan Mahmoud II, à côté de son père et de son frère Abd-ul-Medjid telles sont les nouvelles que le télégraphe nous apporte aujourd'hui de Constantinople. La révolution du 29, qui s'était opérée si pacifiquement, se dénoue comme un drame, à cinq jours d'intervalle, par la mort du vaincu. Au début de son règne, ce prince avait inspiré de grandes espérances. En 1861, il confirma les réformes édictées par son frère, il promit l'égalité à ses sujets de toute religion et réduisit sa liste civile de 70 millions de piastres à 12 millions. Il autorisa en 1867 les étrangers à devenir propriétaires d'immeubles, il créa un conseil d'Etat l'année suivante, et en 1869 il fit publier un commencement de code civil, détachant pour la première fois la loi civile de la loi religieuse. Le fait de son voyage dans l'Occident fut considéré comme une grande concession aux idées modernes. Spus le règne d' Abd-ul-Aziz la Porte s'était tirée de l'affaire de Syrie par un accord avec les puissances; elle avait éteint l'insurrection crétoise par l'octroi d'une Constitution locale, et son général, Ompr-Pacha, triomphait des Monténégrins et dictait la paix à ces montagnards. La Turquie conservait encore une apparence de force. Il fallut l'insurrection de l'Herzégovine et de la Bosnie et l'impuissance de la Porte à soumettre les insurgés, il fallut la banqueroute, dont la déclaration, qu'on pouvait- prévoir, fut précipitée par la guerre, pour établir, aux yeux de l'Europe et à ceux des Turcs eux-mêmes, combien rapide avait été la décadence de l'empire sous le règne d'Abd-ul-Aziz. On vit alors clairement que. les réformes annoncées restaient sans' exécution, que les milliards empruntés à l'Europe avaient été gaspillés, que les ressources du Trésor étaient absorbées par les fantaisies du sultan, par la.construction de palais et de mosquées inutiles, par l'achat de canons et de bâtiments cuirassés, que les fonctions publiques étaient achetées au sérail, et exploitées comme une ferme, au détriment des populations. On ne payait plus ni' les rentiers turcs ni les fonctionnaires ni l'armée, et l'empire était tenu en échec par une province insurgée. Tous les intérêts privés de la population turque étaient en souffrance, ainsi que l'intérêt national. Dans cette situation, et avec la colère et le mépris qu'elle inspirait aux Turcs pour le gouvernement d'Abd-ul-Aziz, la révolution était mûre. On ne doit pas s'étonner qu'elle se soit opérée si vite et sans que personne ait essayé de défendre le sultan; sans qu'un Turc ou un rayah ait manifesté unxregret de sa chute....

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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