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Le Temps, 8 octobre 1881

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Le Temps
8 octobre 1881


Extrait du journal

tais mort; — je voyais dans leurs yeux une ter . reur horrible, et ils se sauvaient. Alors j’étais pris d’une rage contre les vivants, d’une envie de fantôme d’épouvanter, de faire mal et de faire peur; et je me mettais à les poursuivre; je courais, je courais après eux, par-dessus les tombes, en faisant « Hou I Hou ! » en poussant des cris lugubres. Et quand je les avais bien poursuivis, je reve nais m’asseoir sur ma pierre, pour en attendra d’autres. Je sentais que je m’éteignais, malgré la tension de toute ma volonté, — que je m’en allais, que je m’en allais, — que bientôt on ne me verrait même plus. C’était bien un crépuscule de juin; il y avait des parfums de fleurs dans ce cimetière, des parfuma si suaves, si pénétrants qu’ils me grisaient; il y avait des guirlandes de roses partout sur les tombeaux, et de hautes herbes fleuries, au-dessus, desquelles les phalènes et les moucherons dan saient toujours leurs rondes légères. Tout cela m’enivrait de désirs de vie et d’amour, moi qui étais mort Tout à coup je vis Pasquala Ivanovitch quî passait dans une allée, avec des chèvres blanches. Elle ne devait pas savoir que j’étais mort, Pas quala, puisque cela venait de m’arriver tout de suite ; — et je m’avançai vers elle, pour voir... Elle me regarda en souriant, et m’ouvrit ses bras, — et je la serrai contre moi, et je vis que je pouvais éprouver encore toutes les ivresses Il était cinq heures du matin. On vint m’éveiller pour l’appareillage. Je me levai à la hâte, je jetai de l’eau froide sur ma tête qui me faisait grand mal, et montai sur le pont où le jour commençait â paraître. — Les fleurs des myrtes et des citronniers peu vent donner des rêves bien sombres... Appareillé à six heures, pour aller faire des tirs en pleine mer. A neuf heures nous sommes au large. L’Adriatique calme et bleue. Tiré du canon, tout le jour : beaucoup de tapage et beaucoup de fumée, sous un beau soleil. Des officiers français et russes y assistent comme invités. Il en résulte le soir un grand dîner international. Retour dans la baie de Baozich â la nuit tom bante. Je suis de service à l'arrivée, et de quart pour la nuit, de minuit à quatre heures du matin. Demain seulement je pourrai revoir Pasqua-; la Ivanovitch. PIERRE LOT (A suivre J...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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