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Le Temps, 10 septembre 1933

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Le Temps
10 septembre 1933


Extrait du journal

Nous voici au dix-neuvième anniversaire de la victoire de la Marne. A mesure que les années passent, ce miracle de redressement français apparaît plus éclatant, plus riche d’enseignements, -plus exemplaire. 11 nous apprend à ne jamais désespérer de notre pays, même dans les pires conjonctures. Mais il nous rappelle que pour vaincre le sort adverse, il faut une volonté - unanime et violente, un effort profond sans réticences et sans recul, un dévouement total à la patrie. Il nous indi que encore que l’effort donné au dernier moment, au bord de l’abîme, reste toujours chanceux, qu’en tout cas il coûte trop cher et que -mieux vaut l'accomplir lentement, avec ténacité et persévérance. Le miracle de la Marne fut. en effet trop sanglant. Il l’eût été moins sans doute, et peut-être même eût-il été rendu inutile si l’unanimité-du pays avait été acquise plus tôt dans la préparation des moyens de défense. La Marne symbolise à juste titre la victoire de la . liberté dont le fleuve sacré était vrai ment la tranchée suprême. A l’enthousiasme mystique qui soulève aujourd'hui l’Allemagne vaincue, à cette ardeur d’adoration qui la porte vers un despotisme brutal, on peut mesurer ce qu’aurait pu être, sans la victoire de la Marne, l’ivresse dlun peuple dont les-armées auraient atteint Paris et ■ submergé la > moitié de la France en 1914. Quel déchaînement de vio lence, quel esclavage nous aurions subi ! Les événements d’à présent devraient en faire sou venir les générations nouvelles et les hommes politiques trop oublieux souvent des leçons du passé. Et c’est pourquoi nous souhaiterions que cet anniversaire fût célébré officiellement avec plus de magnificence, que le gouverne ment et les pouvoirs publics y participassent en corps comme le pays tout entier y doit participer en esprit. Plus que l’armistice du 11 novembre, la victoire de la Marne devrait être une fête nationale , de recueillement, de volonté et d’espoir. Qu’on ne s’y trompe pas en effet. Ce que la Marne nous a épargné, c’est précisément la réalisation du rêve brutal de l’Allemagne de nos jours. Cette grande Allemagne de cent millions d’hommes, maîtresse de l’Europe et dont le monde serait tributaire, elle a failli se réaliser, et sans l’héroïsme de la. noble Belgi que, sans la barrière sanglante de nos soldats, le secours des autres pays soucieux de main tenir la liberté serait arrivé trop tard. Mais cette folie de domination qui avait poussé le gouvernement de Berlin à piétiner les con trats les plus sacrés, à violer la neutralité belge, à considérer les traités comme des chif fons de papier pour mettre le continent à feu et à sang, cette folie ne s’est pas dissipée. Le monde se trouve encore, de par sa propre fai blesse, en face d’un peuple de soixante mil lions d’habitants, animé d’une ardeur fu rieuse, que l’on pousse de nouveau à l’aven ture, qui ne cache pas ses désirs, qui ne se soucie en aucune manière des traités accep tés et des forces morales internationales, d’un...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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