Extrait du journal

SONNE ORIENTATION Quand M. Trouillot s’est installé au ministère des colonies, nous disions : Nos colonies nous coûtent une centaine de millions par an, elles sont grandes comme sept à huit fois la France, et nous n’en demandons pas moins annuelle ment pour près d’un milliard de produits colo niaux aux pays étrangers ; réduire ces dépenses, qui sont excessives et qui jettent la défaveur sur nos colonies, et faire produire ce milliard de marchandises par cet immense empire colonial, quelle œuvre grandiose ! Les deux souhaits, sont du reste en corrélation étroite : si nos colonies produisaient ce milliard de marchandises, elles seraient riches ; et si elles étaient riches, elles n’auraient aucun besoin des subventions de la métropole. Cette œuvre, le nouveau ministre serait dis posé à l’entreprendre. La circulaire très déve loppée dont nous avons donné une analyse hier, en Dernière heure, manifeste de sa part l’inten tion d’orienter sa politique dans ce sens. Nous ne saurions trop l’encourager à s'y engager avec résolution. A notre avis, la propagande coloniale dans no tre pays s’adresse beaucoup trop exclusivement aux commerçants. Le commerçant échange les produits; mais celui qui les crée, c’est le colon proprement dit, l’industriel qui exploite les fo rêts et les mines, et surtout l’agriculteur qui chaque année tire du sol une récolte. Quand un commerçant arrive dans un pays ou un autre commerçant est déjà établi, c’est un concurrent qui se présente ; et si la production locale n’aug mente point, ils seront deux désormais à se par-’ tager ce qui était auparavant le bénéfice d’un seul. La prospérité générale ne gagne rien, et celle des particuliers diminue en se divisant. Dans combien de nos colonies le nombre des commerçants n’est-il pas déjà plus grand que ne le comporte le trafic à faire 1 Au contraire, un agriculteur qui s’installe n’est pas un concur rent pour les agriculteurs déjà installés; il leur apporte plutôt un concours, il est le bienvenu. Quelques cultivateurs de café sur une côte, par exemple, auront en effet de la peine à placer leur récolte ; les marchands ne se dérangeront pas pour eux s’ils ne jugent pas que leur groupe en vaille la peine ; tandis que s’ils sont nombreux ils constitueront un marché important où l’on...