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Le Temps, 12 juillet 1894

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Le Temps
12 juillet 1894


Extrait du journal

quand il manque de pain, se consacrer à un travail libéral alors qu’il est condamné à une besogne de bête de somme. Chalus s’animait. Blanche s’oubliait, oubliait Ossun et Catherine. L’épais rideau qui séparait son moi de l’humanité réellement douloureuse, de l’humanité déshéritéee par la misère du cœur et de l’esprit, de l’humanité qui ne connaît que ■ la sordide et grossière souffrance de la faim, l’épais rideau se déchirait, et pourtant elle s’ac cusait encore. — Hélas I une piqûre d’épingle dans mon doigt m’est plus sensible qu’un coup de couteau à mon prochain. t — Parce que ce coup de couteau n’a jamais été donné sous vos yeux. Les riches n’ont dès pauvres qu’une idée théorique. Quand on s’est line fois bien figuré ce que c!est qu’un pauvre, on ne l’oublie pas. II faudrait organiser pour le secours une publicité à l’américaine, comme lorsqu’il s’agit d’amener la foule au cirque : des affiches sur les murs, des hommes porteurs de pancartes, de grands avis dans les journaux. - « Riches, donnez les miettes de vos tables; -ne laissez pas les habits se ronger aux vers; ne gardez pas en des placards des chaussures sans emploi. Songez à ceux qui ont faim, à ceux qui ont froid. Laisser perdre, c’est un crime de lèsehumanité... » Les riches seraient tirés de leur ignorance, de leur calme. Ils auraient, le vou lant ou non, ce memento toujours sous les yeux : « Il y a des pauvres ! » Ils donneraient, ne fût-ce çiue par égoïsme, pour détruire cette misère importune leur gâtant leur luxe. Puis le jour viendrait où ils donneraient par émulation, s’in téressant aux pauvres, les aimant comme tous ceux que l’on sauve. Ainsi traité, le fléau de la misère disparaîtrait; On n’aurait plus qu’à prendre des précautions pour prévenir son re tour, des mesures , pour les cas exceptionnels. Il y aurait aussi des affiches dans les quartiers populaires: «Si vous êtes dans la détresse, allez à tel endroit, vous serez soulagés. » Et partout se glisseraient des maximes, des sen tences, des renseignements. Oui, Paris devrait être un grand livre. Puisque tout le monde sait lire, tout le monde lirait à toute heure, partout. En lettres gigantesques, au faîte des maisons, la déclaration des droits et des devoirs \ en ca ractères plus serrés, mais plus rapprochés des...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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