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Le Temps, 15 octobre 1911

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Le Temps
15 octobre 1911


Extrait du journal

ment suspect à mes côtés... Dépendant j’étais plus las encore que je ne l’imaginais. Et une agréable torpeur commença enfin de m’envahir tout entier. L’incessant bourdonnement des in sectes faisait une sorte de berceuse à mes oreil les, tandis que d’un œil de plus en plus vague je suivais la danse d’un tourbillon de mouches à feu au-dessus de moi, mollement bercé par le frémissement harmonieux de la brise parmi les grands ambres... Je m’endormis. Tout à coup je sursautai, violemment tiré de mon sommeil par le son le plus inattendu, le plus surprenant en ce lieu et à cette heure. Une cloche sonnait à peu de distance. Prêtant l’oreille, j’écoutais, ne pouvant croire au témoignage de mes sens; mais il était im possible de douter. Jamais cloche dominicale appelant les fidèles au service divin ne résonna plus claire. On eût dit la sonnerie agitée de quelque paquebot convoquant les passagers re tardataires à bord. L’idée d’un vaisseau traver sant soudain mon esprit, je bondis sur mes pieds, et me dépêtrant de couverture et mousti quaire, j’aperçus miss Grant soulevée dans son hamac. ' ' - • • —Oh! monsieur Musgrave! qu’est-ce que cela peut être? interrogea-t-elle avec anxiété. — Quelque vaisseau qui se trouve tout près de la côte!... peut-être échoué!... répliquai-je, me préparant à courir à l’entrée de la baie. —Non! Le son vient de là! dit-elle, indiquant la petite forêt obscure,. Rejetant'la moustiquaire, elfe"sauta à bas de sa couche, et venant à moi, saisit mon bras. — Qu’est-ce que c’est?'Qu’est-ce que ça peut bien être? répéta-t-elle angoissée. ■ La cloche ne battait plus vivement mainte nant; le -fossoyeur sonnant le. glas n’a jamais tiré de l’airain sons plus mélancoliques. Les coups nous arrivaient lents, solennels, réguliè rement espacés; puis tout se tut... • Tandis que j’essayais de toutes mes forces de déterminer le point d’origine de la sonne rie, elle recommença brusquement, mais-cette fois agitée, trépidante, folle, — évoquant in vinciblement l’idée d’un aliéné pendu au bout de la corde et tirant de toute sa force démente. L’île entière résonnait de cette clameur; les bêtes épouvantées glapissaient, sifflaient, s’en volaient, détalaient à travers lés longnes’ iierbes; notre paisible îlot semblait transformé en un pandémonium. W. Clark Russell. (A -suivre}....

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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