Extrait du journal

Dans le discours de clôture du Parlement anglais, la reine se félicitait de pouvoir parler en termes favorables de la tranquillité et de la prospérité crois'santé de l'Irlande. Sous l'empire des mesures réparatrices votées depuis l'avénement du ministère Gladstone, de grands progrès sont, en effet, en voie de s'accomplir dans ce pays tant au point de la paix publique que de l'amélioration sociale, mais il se passera du temps avant que les haines politiques et religieuses ne soient apaisées et que l'Irlande cesse d'être la terre classique des démonstrations violentes et des conflits de culte et de race. C'est surtout dans le comté de l'Ulster, où la proportion numérique des catholiques et des protestants, des Celtes et des Atiglo-Saxons est moins inégale qu'ailleurs, que les antipathies séculaires continuent à se manifester avec le plus d'intensité, et c'est à Belfast, la citadelle du protestantisme, que les émotions populaires acquièrent toujours leur maximum d'intensité. Des processions oraii.gistes avaient eu lieu récemment sur divers points à l'occasion d'anniversaires de parti. Les catholiques ont voulu avoir leur tour, et le jour de l'Assomp.tion, de grandes multitudes, au milieu desquelles l'élément fénian jouait naturellement un grand rôle, se sont promenées en ordre, avec rubans et bannières pleines d'inscriptions et de devises significatives, dans nombre de localités. Presque partout les choses se sont passées assez paisiblement faute d'opposition, mais à Belfast elles ont pris une tournure plus sérieuse; des collisions se sont engagées entre les manifestants et leurs adversaires habituels; de véritables combats ont été livrés à coups de briques ou de bâtons, parfois même avec des armes plus meurtrières; il y a eu un homme tué, beaucoup de contusions, et la police, qui s'était interposée pour rétablir la paix à force d'arrestations, a eu, elle aussi, sa bonne part de horions. Les désordres commencés le 15 ont continué depuis; les rixes se sont multipliées; les agents de l'autorité ont dû charger plusieurs fois les émeutiers à la baïonnette des -maisons ont été assaillies et démolies dans plusieurs quartiers; il en a été, paraît-il, de même d'une caserne de police. La lutte durait encore hier, et les dépêches les plus récentes annoncent que la foule conservait un aspect menaçant et qu'il régnait dans la ville une grande agitation. Il est cependant à espérer que nous apprendrons bientôt la fin de tout ce déplorable tumulte, mais pour le voir sans doute recommencer à la prochaine occasion....