Extrait du journal
combe le soin de secourir les indigènes. Une propo sition pour leur avancer également des semences a été faite en conseil général de Constantine. Si l’on songe que le plus clair du budget des départements algériens provient de l’impôt arabe, il semble qu’en effet c’eût été à eux de traiter la question. Tel n’a pas été l’avis du conseil général qui a répondu par un refus. Nous ignorons ce qui s’est passé dans les autres départements, mais il est probable qu’on n’y a pas fait davantage, puisque le gouverneur géné ral a saisi la métropole de la demande d’un secours de 1,200,000 francs que le Parlement va avoir à examiner et qu’il ne refusera sans doute pas, car le nécessité en est évidente. Hésiterez-vous sur la conclusion? Il n’est pas dou teux quç les choses ont été beaucoup mieux con duites en Tunisie. En premier lieu, c’est une avance seulement qu’on a faite et non pas un don gratuit. La somme que pourra perdre le trésor tunisien, quand il réglera définitivement l’opération, sera insignifiante, tandis que pour l’Algérie il en va coûter 1,200,000 francs à la métropole. Et les malheureux auront été beau coup plus sûrement secourus. Qui ne sait que dans les-distributions pures et simples d’argent, ce ne sont pas toujours les plus éprouvés, mais les mieux recommandés, qui reçoivent; tandis que quand fine s’agit que d’une avance, chacun calcule exactement sa demande sur ses besoins. Sans compter que ces aumônes ne laissent pas d’être démoralisatrices. Quelques journaux algériens le font remarquer, en ajoutant qu’en compensation des sommes qui seront remises aux indigènes, on devrait leur demander de travailler à des œuvres d’utilité publique. Même avec ce palliatif, la solution algérienne ne vaudrait pas encore la solution tunisienne. Ce que des labou reurs savent le mieux faire, c’est labourer. Avec des avances de semailles, fis feront de bonne beso gne, tandis qu’ils n’en feraient probablement que do médiocre à terrasser sur les routes. En second lieu, les avances en Tunisie ont ôté faites en temps utile. Pour s’expliquer ce que nous voulons dire, il faut savoir que dans le nord de la Tunisie, la saison de la végétation est infiniment plus courte qu’en France. Elle commence en no vembre avec les pluies et s’arrête en mai quand commencent les grandes chaleurs. Il s’ensuit que le temps des semailles est beaucoup plus resserré aussi. Elles se font dans de bonnes conditions jus que vers le 31 décembre. De là au 15 janvier, le ré sultat en est déjà douteux et, passé ce délai, elles sont vouées à un échec à peu près certain. En sup posant que les Chambres votent le secours de mandé pour l’Algérie dès leurs premières séances et que l’administration en fasse la distribution avec toute la célérité désirable, fi est impossible que celle-ci commence avant une quinzaine de jours. Elle aidera les malheureux à acheter du pain, elle ne pourra plus les aider à faire leurs semailles. Ainsi la population indigène qui vient de subir trois mauvaises années à cause de la sécheresse, est as surée d’en éprouver une quatrième, malgré les pluies qui sont tombées, parce que ses semailles auront été insuffisantes. Si ces différences tenaient à des questions de per sonnes, fi n’y aurait aucune considération générale à en tirer. Mais, nous ne cesserons de le dire, le personnel en Algérie a autant de mérite à nos yeux que le personnel en Tunisie; dans la plupart des cas tous les deux sortent des mêmes cadres métropoli tains. A quoi tient donc que cette question après une autre a reçu une meilleure solution ici que là ? A ce que les principes d’organisation qui dominent toute l’activité administrative ne sont point les mômes. En Tunisie, l’autorité qui représente la métropole a gardé en mains la tutelle des indigènes. Y a-t-il une mesure à prendre en leur faveur? Aucune hési tation n’est possible ; ce n’est pas aux représentants des colons, c’est à elle à la prendre. Et en Tunisie, le pays a son budget propre. Quand les avances pour semence ont été résolues, il eût suffi, au besoin, de quarante-huit heures* le temps d’échanger des télégrammes entre la rési dence générale et le ministère des affaires étrangè—r
À propos
Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.
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