Extrait du journal

L’article de M. Léou .Blum a ce matin le ton d’un chant d’allégresse. « L’idée est en marche... », écrit-il en caractères gras. Quelle idée ? La socialisation de l’industrie, et du commerce privé des armes. Et la joie du directeur de conscience du parti socialiste lui vient de la Chambre des députés qui serait, assure-t-il, toute prête à épouser sa grande idée marchante. « La campagne obstinée du parti socialiste. contre les « marchands de canons », cette campagne à laquelle le nom de Paul Faure restera attaché, a porté à fond et fait son œuvre. » Encore que nous sachions que notre encre est montrée dans les milieux révolutionnaires comme un infâme produit de la poudre de guerre mélangée au sang des victimes du capitalisme, nous ne nous inter dirons point de répondre à M. Léon Blum qu’en faisant le bon apôtre collectiviste il essaie d’avancer ses petites affaires d’inter nationaliste ■ désarmeur. . ' Prophétisant selon sa naturelle docte libelliste annonce que la Chambre « sera tenue, bon gré mal gré, d’affirmer que ni la guerre ni la préparation à la guerre ne peuvent com porter la constitution de profits privés ». Voila tout le dessein profond du socialisme exprimé en peu de mots. Au nom du pacifisme et même des plus généreux sentiments, M. Léon Blum s’efforce de socialiser « l’industrie et le commerce privé des armes ». Cela c’est l’idée —J’idée en marche — à l’état de larve. Voyez-la prendre maintenant son vol, des ailes lui ayant poussé : la Chambre sera bientôt tenue « d’affirmer que ni la guerre ni la pré paration à la guerre ne peuvent comporter la constitution de profits privés ». Or, avec quoi fait-on la guerre ? Avec des armes,' mais aussi avec tout ce qui sert aux hommes pour sub sister. Donc ni l’élevage, ni l’agriculture, ni l’industrie textile, ni l’industrie du cuir, ni aucune sorte de métallurgie ne devront, dans la mesure où ils sont fournitures militaires, comporter la constitution de profits privés. Et cette interdiction ne sera pas seulement décrétée pendant la guerre ; pendant toute période de préparation à la guerre, c’est-à-dire dès à présent, c’est-à-dire toujours ; car tout pays qui veille à sa sécurité se prépare for cément à une guerre défensive. Ainsi, « la socialisation dès moyens de pro duction ». s’opéreraitpartiellement tout de suite, sous le prétexte d’empêcher l’industrie et. le commerce privé des armes de s’exercer normalement, soit en procurant un profit légitime. Mais l’idée eç marche avance vite, et atteint, le, carrefour où.,elle dçit logiquement aller. C’est la préparation à la guerre qui doit être socialisée, et par conséquent toutes les industries et tous les commerces ; car on ne se prépare à la guerre qu’en assurant d’avance, non seulement le ravitaillement en armes et en munitions des armées, mais leur nour riture et tout leur- entretien. Et voilà où mène une idée socialiste audacieusement conçue et judicieusement poussée jusqu’à ses consé quences. Et voilà où M. Léon Blum se flatte d’amener le Parlement français. Toutefois, nous. continuerons de penser que le bon sens et la prudence gardent chez nous quelque droit. Partisans comme nous le som mes de l’organisation méthodique d’un contrôle national et international de.la fabrication des armes de guerre, nous attendons du Parlement qu’il'continue d’aider efficacement à la défense nationale, en écoutant lés avis autorisés de ceux qui .en .ont' la responsabilité.. ' v....