Extrait du journal
Le lendemain de l’en terremen t de Lefrançois, Juliette travaillait dans la boutique, qui était restée fermée trois jours. Elle ne pleurait plus, mais elle pensait vaguement qu’elle al lait désormais bien s’ennuyer; elle ne savait pas au juste pourquoi, mais elle en était sû re. Songeant ainsi, elle avait laissé tomber les ciseaux avec lesquels elle décousait les broderies d’argent d’un vieil habit. Sa mère la rappela rudement à la besogne. Juliette, arrachée à sa rêverie, tressaillit et ramassa ses ciseaux. En même temps, elle leva les yeux, et elle ‘ aperçut Fernand Roy qui pas sait sur la place du Marché, et qui lui faisait un signe de tête amical. Mais il 6e s'arrêta pas et continua son chemin. < — En voilà un, dit la mère Lefrançois, dont, Dieu merci! nous sommes débarrassés. 11 n’a qu’à venir, ce païen-là ! c’est moi qui lui dirai son fait. Allons,travaille, feignante ! Juliette ne répondit pas un mot, et elle se mit à découdre et à coudre avec une activité surprenante. Sa mère en avait trop dit; elle bomprenait maintenant pourquoi elle s’en nuierait, pourquoi elle serait malheureuse. De la journée, elle ne levapas la tête. Quand .vint l’heure du souper, elle dit qu’elle n’avait pas faim et alla se coucher. La nuit entière, elle resta éveillée, accoudée sur son traversin, la tête dans la main. Au jour, son parti était pris. Elle se leva et fit un petit paquet des objets auxquels elle lenait : la ceinture tricolore qu’elle avaitdans les fêtes républicaines, deux livres que son père lui avait donnés, une pensée desséchée que Fernand Roy lui avait offerte en plaisan tant, et qu’elle avait enfermée dans un petit sachet. Ce sachet, elle le portait suspendu à son cou, sur la peau, et sa mère croyait que c’était un scapulaire; quelques au tres babioles enfin. Elle voulait quitter la maison dès le malin, mais elle n’osa. Il lui semblait que si elle sortait, sa mère devinerait sa pensée et la retiendrait. Tout , le jour, elle demeura dans une affreuse perplexité. Elle était résolue à partir, et elle n’avait pas même le courage de se lever de sa chaise. Elle était plus pâle qu’à son ordi naire, et elle tremblait comme si elle eût eu la fièvre. — Es-lu malade, Juliette? lui demanda sa mère. — Non, répondit-elle. — Eh bien, alors, tâche d’avoir une autre figure ! J’aime pas ces mines-là à la maison. Puis, la mère Lefrançois s’en alla dans j l’arrière-boutique préparer le souper. Juliette alors se leva. Elle ouvrit la porte et resta quelques instants sur le seuil, puis elle i |...
À propos
Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.
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