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Le Temps, 21 septembre 1934

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Le Temps
21 septembre 1934


Extrait du journal

L’ÉTAT ET LE BLÉ Une note récente paraissait indiquer que le problème : du blé pouvait être, résolu assez. : rapidement , par une opération,, très , simp_le. Le gouvernement n’aurait qu’à, acheter' le stock disponible de la récolte 1933, qui pèse si lourdement sur le marché, et, fort de cette largesse de 800 millions faite aux agriculteurs, à leur demander en échange, sur le terrain électoral, une manifestation non équivoque de leur reconnaissance. L’accord du ministre de l’agriculture était donné comme acquis. Quant au président du conseil, il allait étudier très sérieusement la question et prendre une déci sion qu’il ferait connaître au cours d’un des prochains conseils .des ministres. Il semble bien qu’il y ait là une série de malentendus. Lé ministre de l’agriculture, qui a voix au chapitre, n’a jamais caché qu’il était, ou plutôt qu’il restait l’adversaire d’une opération de cette nature. Le. ministre des finances, de son côté, s’il était consulté, ne manquerait pas de rappeler que l’Etat intervient tous les jours, et que plusieurs lois ont créé pour le finance ment de ces interventions, des ressources consi dérables. Enfin, le président du conseil connaît la question trop bien, et depuis trop longtemps, pour ne pas savoir que la solution sinon pro posée, du moins suggérée, ne comporterait que des inconvénients sans aucun avantage, pas même celui de plaire àu$ producteurs de blé, qui ont la sagesse de n’en vouloir à aucun prix. D’abord, ces 800 millions, où les prendre-? Et ce blé, en Te supposant acheté'et payé, où le mettre? Et ensuite à qui le vendre ? ’ Huit cents millions de francs,1 cela repré sente un peu plus de six millions de quintaux de.blé de la récolte 1933, sur vingt, c’est-à-dire de quoi alléger le marché,, mais non pas vider les greniers, de quoi faire aussi plus de mécon tents que d’heureux. Ge n’est pas précisément cela qui est souhaitable... Mais voilà, par hypothèse, l’Etat en posses sion d’un stock relativement considérable, qu’il aura payé au prix légal, donc au prix fort. S’il garde ce grain, de quels silos, de quels délais, de quelle main-d’œuvre, de quel con trôle disposera-t-il'? S’il le vend sur le marché intérieur, ne concurrencera-t-il pas ceux-là mêmes qu’il prétendait aider ? Et s’il cherche à l’exporter, n’ira-t-il pas de même contre leurs intérêts, et n’amoindrira-t-il pas l’effet de la prime qu’il accorde à l’exportation ? De quelque côté qu’on envisage l’opération, on ne peut conclure qu’à son impossibilité matérielle. Mais elle soulève une objection de principe autrement grave. Les producteurs de blé n’ont .jamais demandé à l’Etat de les . aider sans qu’iis s’aidassent eux-mêmes. Ils lui ont apporté un concours réel, comme cette taxe de trois francs par quintal de blé envoyé au moulin) qui assure le remboursement: des emprunts contractés par la Caisse, nationale de crédit agricole pour le financement . .des exportatioiis. Ce qu’ils‘attendent de l’Etat, etleurs représentants l’ont cent fois dit et écrit, c’est que le problème du blé ne soit pas séparé des autres, mais qu’un plan d’ensemble soit élaboré, chaque catégorie de producteurs tra-, vaillant à l’organisation commune sur le plan qui lui est propre. Si l’Etat se mettait à acheter les excédents de blé, il n’aurait aucune raison de ne pas acheter aussi les excédents de vin. Il n’est que de mettre un doigt dans l’engre nage, le bras et le corps y passeront... . Le ministre de l’agriculture avait vu juste, tout au début de la discussion instituant un prix minimum pour le blé, lorsqu’il avait déclaré que la loi ne serait pas respectée si l’Etat ne se portait pas acheteur des quantités offertes au delà des besoins de la meunerie. Aujourd’hui, il faut constater le fait : la loi n’est pas respectée. Mais personne ne songe pour cela, sérieusement à mettre a la charge...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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