Extrait du journal

IX—-(Suite) L’armée, hurlante et joyeuse, se développait sur la route, et la route était.pleine de char mantes surprises et se diversifiait à tous les pas. Maintenant, des peupliers bas l’ombra geaient à droite, et on découvrait par delà une campagne boisée comme celle de la Lombardie, sillonnée comme elle de canaux étroits et de ruisseaux fins. A gauche, beaucoup de petits arbres décelaient le voisinage du fleuve, sur un terrain plus inégal. L’armée hurlante et joyeuse se développait sur la route, et ensuite, pendant très longtemps, la route lut toüte droite. Elle coupait des herbages perlés de rosée, moelleux à l’œil, et d’un vert cru comme au printemps. Des rideaux de peupliers s’y déroulaient, sui vant de capricieuses courbes. On les voyait, on les comptait à travers leur transparence jusque très loin, et cette succession donnait au paysage une profondeur illimitée. Après cela, ce fut encore la campagne de Lombardie : on aurait pu croire que la retraite avait continué et que l’armée en fuite arrivait dans les environs de Milan. Mais cette cam pagne était déserte, sans une ferme, sans un paysan : elle ne révélait que par sa culture ses habitants invisibles. Plus loin, l’armée traversa un misérable hameau de sept ou huit feux : mais toutes les portes des maisons étaient closes, et pas une tôte ne se montrait aux fenêtres. Plus loin, on en dépassa un autre, mais qui était à quelque distance du chemin et disséminé sous les saules. Puis la route devint tortueuse, et la campagne, d’une végétation lu xuriante. De l’eau claire coulait dans les fossés, et des canards de Barbarie y glissaient parmi les feuilles planes des nénuphars. C’était com me un coin de parc; d’arbre en arbre, des vignes pendaient en festons. Giovanni empoigna Reproduction et traduction interdites....