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Le Temps, 23 janvier 1896

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Le Temps
23 janvier 1896


Extrait du journal

i LA QUESTION DU CHOMAGE La Chambre s’est occupée, hier, de la ques tion du chômage. M. Vaillant a interpellé le gouvernement « sur les mesures à prendre » contre le manque de travail. Le débat eût pu être intéressant, car peu de sujets prêtent à une etude plus fertile en aperçus variés. Nombre de bons esprits signalent, dans le commerce, dans l’industrie, dans le monde financier ou agricole, des difficultés croissantes de produc tion et d’affaires. A force de sacrifices et de . patience, en restreignant de plus en plus leurs bénéfices, les chefs d’entreprise soutiennent tant bien que mal leur situation, maintiennent ouverts leur ateliers, leurs usines ou leurs ban ques; mais, si les ouvriers conservent ainsi, en général, des salaires, il est à craindre que, la crise venant à s’accentuer, de nombreuses mai sons ne soient contraintes de fermer. Chaque jour, le découragement gagne un peu plus les patrons, sur qui retombe la lourde charge de la mise en œuvre du travail. Comment dévelop peraient-ils leurs opérations, comment accroî traient-ils leur personnel, comment lui assure raient-ils une rémunération plus avantageuse, alors qu’ils n’ont ni la sécurité du lendemain, au point de vue économique, ni mêmela sécurité du •présent, au point de vue fiscal? De toutes parts et atout instant s’élèvent de nouvelles menaces con tre ceux qui risquent leurs capitaux dans les af faires. Un jour, c’est la rupture de nos traités de commerce ; un autre, c’est le remaniement .de notre système d’impôts ; un autre encore, c’est l’annonce de lois dites sociales qui doivent grossir les frais déjà si considérables de la pro duction ; puis, ce sont des attaques incessantes, répétées, contre le « régime capitaliste », contre les patrons, contre les chefs d’industrie ; des partis violents prêchent « la lutte de classes », prétendent bouleverser la société actuelle. Com ment, dans de telles conditions, la confiance s’é tendrait-elle, l’industrie serait-elle prospère, le Chômage diminuerait-il ? > ; On sent à quels exposés eût prêté, dans cet ' ordre d’idées, l’interpellation de M. Vaillant, à quelles observations essentiellement pratiques elle eût pu donner lieu, de quelles conclusions utiles, efficaces, elle eût pu, enfin, être suivie. Mais il eût fallu que l’auteur de l’interpellation daignât sortir des régions de la métaphysique, pour aborder un peu le domaine des réalités vivantes. M. Vaillant et quelques-uns de ses amis préfèrent sren tenir à une théorie, bien dé modée pourtant, car l’histoire lui inflige les plus cruels démentis, —mais qu’importe à ceux qui dédaignent les leçons de l’histoire? Pour eux, c’est l’invention des machines qui a causé tout 1e mal. Avant les machines, l’âge d’or régnait; les ouvriers étaient largement pour vus de travail ; les salaires étaient élevés et constants; le régime capitaliste était inconnu; point de chômage : la terre ignorait ce fléau. Mais voici que les machines sont inventées, et, aussitôt, la misère apparaît. M. Vaillant en est convaincu. Il décrit les effroyables effets de cette abominable invention. Il y avait, avant elle, une situation admirable. « Cette situation a cessé le jour où la machine a été introduite dans l’ate lier. Alors le nombre des ouvriers a diminué parce que la machine en a remplacé un certain nombre, fabriquant avec moins de main-d’œuvre le même produit ; et, à mesure que le machi nisme se développait, ce phénomène devenait déplus en plus grand. Le développement du machinisme suivait, si rapide qu’il fût, le besoin des produits, donnant, vu l'anarchie économi que, une production excessive où la machine 1 toujours plus perfectionnée fonctionnait Rvec un nombre toujours plus restreint d’ouvriers, en rejetant un nombre toujours plus grand dans.Ie chômage. » Et voilà comment les travailleurs sont dans la misère, voilà pourquoi ils sont pri vés d'ouvrage ! M. Faberot tient le même langage, et il pré cise : « Citoyens, dit-il, il y a environ trente ans, avant que la machine fît son apparition, le chômage était bien moindre qu’il ne l’est aujour-...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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