Extrait du journal

LA RÉPUBLIQUE PORTUGAISE Au milieu d’un grand concours de peuple, la République portugaise a été proclamée par l’As semblée constituante. . Cette Assemblée, on s’en souvient, avait été élue à la fin de mai. Dans le plus grand nombre des circonscriptions, trente sur cinquante, l’élection avait été disputée entre les candidats duêotnit'é directeur républicain et les candidats indépendants ou socialistes. Dans les autres,' les candidats du comité directeur . n’avaient pas de concurrents. Les .monarchistes s’étaient tenus à l’écart en prétendant que le scrutin ne leur assurait aucune gerantie de liberté. Le gouvernement avait pris d’importantes mesu res d’ordre, concentre l’escadre dans les eaux d’Oporto. En fait, aucun incidentne se produisit, ni à Lisbonne ni dans les. provinces. Quant au résultat, qui dès le début n’était point douteux,’ il fut nettement favorable au gouvernement et celui-ci, en convoquant pour le 19 juin la Cons tituante, pouvait prévoir le vote qui, à l’unani mité, a confirmé lundi le régime républicain. Dès le lendemain de ce vote, le gouverne ment a publié un message, dans lequel il re trace les causes et les conséquences de la révo lution du 5 octobre 1910. Il rappelle que cet événement, dont la soudaineté étonna le monde, était la conclusion logique d’une crise déjà longue ; que la monarchie avait prouvé son impuissance ; que la nation avait le droit de ressaisir son autorité ; qu’elle a exercé cette reprise dans une forme mystique que l’on a mal comprise à l’étranger; qu’elle a rencontré une approbation populaire unanime. Le mes sage se plaint enfin que la nouvelle république ait été dans la presse européenne l’objet d’une campagne hostile qu’elle ne méritait point et contre laquelle elle a réagi d’ailleurs par une censure parfois rigoureuse. La susceptibilité des républicains portugais est légitime dans son principe, mais peut-être excessive dans ses manifestations. Nous ne croyons pas que sauf de rares exceptions, il se soit trouvé des journaux pour mener contre ..eux une campagne systématique de mauvaise foi. .far contre, la presse étrangère n’a:pu pas ser sous silence les ’ incidents fâcheusement répétés qui ont marqué les derniers mois. Ces incidents, dont le Temps a impartiale ment recherché la cause, semblaient résul ter de l’erreur initiale commise par les me neurs de la Révolution, convaincus qu’il suffisait d’une formule nouvelle pour trans former les mœurs. De là sont venues des me sures politiques et sociales prématurées, im prudentes, qui ont jeté le trouble dans la vie publique et lésé de légitimes intérêts. Il était impossible de ne pas le constater. Mais jamais cette constatation n’est allée sans l’espoir d’un progrès, dont les premiers symptômes seront salués, ici surtout, avec une cordiale sympa thie. ( Si, dans ces jours de fête, des conseils ami caux peuvent trouver leur place, qu’il nous soit permis de rappeler aux républicains portugais que la facilité de leur succès est le plus grave des périls qu’ils aient à conjurer. La monar chie n’a pas été'renversée. : elle s’est effondrée d’elle-même, parce que depuis des années elle avait été incapable de remplir son rôle et son devoir. Les coteries parlementaires, grâce à cette impuissance, avaient pu fausser la Consti tution et paralyser l’existence nationale. Peuton croire que du jour au lendemain ces tradi tions mauvaises se sont effacées ? Peut-on le croire surtout, alors que dès la constitua lion du gouvernement provisoire, on a vu se dresser en face de lui un comité de fcarbonaristes, dont l’indiscrète activité a sou vent paru inspirée moins par le souci du bien public que parfl’appétit des fonctions? Les hommes de valeur groupés autour de M. Braga savent mieux que nous ce qu’il en...