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Le Temps, 24 mai 1917

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Le Temps
24 mai 1917


Extrait du journal

de paix, ni celui de il’après-guerre,, mais il; repré sentera une formule de transition entre le régime fragmentaire des crédits provisoires et la situa tion plus stable et plus-claire vers laquelle doi vent tendre nos efforts. Il est impossible de mieux marquer 1e but à atteindre : tendohs à nous rapprocher des principes; revenons le plus promptement pos sible à la vérité, à l’équilibre, aux prévisions inséparables d’un juste souci des engagements. On sent combien l’évolution ainsi indiquée est de nature à exercer une heureuse influence, si la pensée, maîtresse dont elle s’inspire pénè tre les esprits, au gouvernement, dans les Chambres, dans le pays tout entier. Faire un budget, c’est prévoir. C’est, donc, compter sur de la stabilité. C’est vouloir gou verner en conséquence. Point de prévisions budgétaires non illusoires, sans la sécurité des contrats privés ou publics, la garantie du tra vail, l’assurance du droit et de la liberté. « A la poursuite de cet équilibre, écrit M. Joseph Thierry, nous- serons contraints de pratiquer désormais une politique fiscale dont la charge croîtra avec nos engagements. » Singulière ment vaine serait cette poursuite, si tout l’effort devait se restreindre aux combinaisons, sou vent si trompeuses, quand elles ne sont pas menaçantes, de cette formule abstraite : « une politique fiscale »‘. Des charges plus lourdes sont à accepter, et M. Joseph Thierry a raison de le dire : « C’est une résolution grave^ipais virile, à prendre à cette heure pour tout l’avenir qui nous attend. » Mais outre que des impôts mauvais peuvent être des semeurs de déficit, ce serait commettre une erreur ruineuse que de voir et de chercher dans des impôts, sous quelque forme qu’on les veuille-instituer, les moyens de' l’équilibre nécessaire. Ils seront, surtout, dans, le développement de la richesse. Quel pourrait-il être, quelle politique fiscale n’aboutirait à de cruels déboires, si, par exem ple, la valeur du billet de banque n’était pas soustraite aux convoitises qui se manifestent? Quel budget espérer, avec des dépenses et des recettes non aléatoires, si l’étalon monétaire devait rester irrémédiablement soumis aux ha sards d’une circulation fiduciaire arbitraire ? Se diriger vers un budget sérieux, c’est vouloir aller résolument vers le retour à la saine mon naie, ce qui implique le renouvellement, sans tergiversations plus longues, du privilège de la-Banque de France. Ce renouvellement, M. Ribot l’avait fait entre voir, il y a plus d’un an déjà. Nul n’a oublié les conclusions formelles de l’enquête à la quelle, sur son initiative, il fut procédé. Renou vellement pur et simple, pour une période d’au moins trente ans, telle fut la demande de toutes les compétences consultées. Qu’attend le gou vernement ? L’autonomie de notre banque d’émission est liée au relèvement national. Qu’elle se voie consacrée, affermie, et cette phrase de l’exposé des motifs, qui est appliquée à la politique fiscale et à l’acheminement vers le budget, sera pleinement justifiée : c’est « le meilleur gage que les pouvoirs publics puis sent donner au pays de leur ferme volonté de résoudre dans toute son étendue le problème financier d’après-guerre ». La plus funeste de toutes les crises, la crise monétaire, aura été conjurée. Du même coup, .on aura coupé court aux avéntùrësvquirienfffaient'plus difficile que j®mais la restauration de notre change. M. Joseph Thierry rappelle les difficultés financières que l’interruption de notre commerce extérieur ré gulier a suscitées. Sans doute elles ont ipu être quelque peu réduites grâce aux placements que l’épargne française avait opérés à l’étran ger. Les titres qu’elle a procurés à l’Etat ont, dans une certaine mesure, allégé momentané ment la situation. D’autre pari, l’entrée des Etats-Unis dans la guerre simplifie pour l’ins tant 1e problème et elle en ajourne à des temps meilleurs la solution. Mais il demeure entier. L’exposé des motifs recommande « de res treindre dans toute la mesure du possible les sommes dont nous sommes appelés à rester, à la fin du conflit, débiteurs à l’étranger ». Le conseil est excellent. On ne peut que s’associer également aux vues du ministre des finances, quand il s’applaudit des espoirs qu’autorise raient « une coordination plus grande et, par une surveillance centralisée, un contrôle plus étroit des programmes d’achats et des engage ments de dépenses au dehors » : rien de plus souhaitable pour que certaines erreurs de l’Etat soient, désormais, prévenues. De même, « nous nous devons plus que jamais d’exercer une dis cipline sévère sur nos consommations et de développer sans cesse nos forces productives », mais est-ce bien seulement « en vue de ràppro-, cher le moment où nous pourrons nous suffire à nous-mêmes » ? Qu’on daigné y songer : sans une politique commerciale de large expansion économique, toute politique fiscale sera vouée à la faillite. Pour que la France puisse reconquérir la place qu’elle avait dans le monde avant la guerre, pour qu’elle puisse se libérer envers l’étranger et recouvrer ses changes favorables de jadis — toutes conditions fondamentales du futur budget en équilibre, voulu par M. Joseph Thierry, et vers lequel il faut absolument se di riger, — des exportations considérables sont à assurer. Si l’idée que nous devons nous suf fire à nous-mêmes venait à prévaloir, c’en se rait fait de la grandeur nationale. M. Joseph Thierry sait trop le prix des échanges libres, pour l’avoir méconnu. Mais d’autres, sous des influences diverses, l’oublient en vérité par trop. On voit saper tes moyens eux-mêmes de cette expansion sans laquelle richesse publique, for tune privées, budget et finances sombreraient. Initiatives privées, contrats libres, engagements de toute nature sont rendus incertains. Par des moratoires successifs, l’Etat en est venu, même, à habituer les débiteurs solvables à l’espoir que remise leur sera faite de leurs dettes. Qu’on y .prenne garde : c’est le niveau moral qui baisse et, avec lui, la source de toutes les énergies ré paratrices. Rétablir le budget, quel mot d’ordre meilleur? Il veut le respect des droits individuels, la ga rantie des contrats privés, la sécurité de la monnaie, la liberté de la production et des échanges, la France déployant son génie, en nemi des tyrannies à l’allemande. Que tous les citoyens soucieux de l’avenir national travail lent doue, cl’uiLjnême cœur, à nous acheminer .« vers le budget »....

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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