Extrait du journal
CHRiïNIQyiJ[HÉATRALE Au Palais-Royal, reprise du Train de plaisir. Aux' Variétés, Paris-Exposition, de MM. Montréal et Blondeau. Au Çhâteau-eTEau, Desaix, drame en cinq actes, de MM. Marot et Péricaud. ̃– Au Vaudeville, les Respectables, comédie en trois actes, de M. Janvier. Le feuilleton était si chargé la semaine dernière que je n'avais pu mentionner la reprise qui s'était faite, au Palais-Royal, du Train de plaisir, vaudeville en quatre actes, de MM. Hennequin, Arnold Mortier et de Saint-Albin. Cette reprise a beaucoup réussi. La pièce est taillée sur le patron du Chapeau de paille d Italie et de la Cagnotte, ces immortelles bouffonneries de Labiche. Mais elle a son petit coin d'originalité. Au troisième acte se trouve une des inventions les plus drolatiques que j'aie jamais vues au théâtre. Le gouverneur d'une prison d'Italie reçoit comme appointements une somme de. sur laquelle il doit pourvoir à tous les frais de l'établissement et, par conséquent, nourrir les prisonniers. Son intérêt est donc de n'en point avoir. Et de fait oncques ne vit-on un homme enfermé dans cette prison modèle. Mais voici que la noce du Chapeau de paille d'Italie ou, si vous aimez mieux, la bande de la Cagnotte, voyageant en Italie pour son plaisir, se fait pincer dans une affaire où elle est mêlée et fourrer au poste. Force est bien au pauvre Bordighieri de les recevoir. Mais son. idée de derrière la tête est de faciliter leur évasion il tire sournoisement les verrous de leurs cachots, il laisse pendre des cordes le long des murs; les prisonniers, en mordant dans leurs pains, se cassent les dents sur des limes; Cassegrain se montre sourd à ces insinuations. Il se sait innocent; il veut être jugé; il ne veut sortir de la prison que tête haute et réhabilité. Il y restera plutôt toute sa vie. Bordighieri tantôt s'indigne « Mais on ne fait pas ça! Mais ça n'a pas de nom!» et tantôt le supplie: Vous ne pouvez pourtant pas moisir dans un cachot, loin de la patrie?.» Cassegrain est inflexible. Toutes ces scènes sont d'un paradoxal bien amusant. Ce qui augmente encore le comique de la situation, c'est qu'aux prisonniers qui ont été pris d'un même coup de filet viennent se joindre, l'un après l'autre, ceux de leurs amis qu'attire l'envie de revoir une maîtresse sous les verrous. On passe par dessus les murs, mais c'est pour entrer dans la prison et non pour en sortir. A chaque fois que le malheureux Bordighieri pénètre dans le cachot et compte ses pensionnaires, il en trouve un de plus. Ils étaient cinq, en voilà six, puis sept ( Sept bouches à nourrir Et, à chaque fois, son horreur redouble. On a ri comme au premier jour. Mais une nouveauté ferait bien mieux
À propos
Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.
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