Extrait du journal

passé chez lui hier par hasard. Il a avancé de grosses sommes sur la fabrique, aussi bien que sur le palazzo Schreiber, et il songe à réclamer le payement de ses hypothèques. Comme depuis des années il a mes affaires en main, il m’a, un peu contre son gré, dévoilé le pot-aux-roses. Bien que le brave homme ait essayé après coup de gazer les choses, je n’ai fait ni une ni deux, et je suis venu te trouver. Je t’en prie, décidetoi vite, ne pense pas à Ruth, ou plutôt pense à elle et à son enfant, à votre avenir. — Oui, certes. Mais, que faire? — Donne-moi ta procuration, ta signature! dit Luc. Je la remets à mon avoué et tu me donne un papier par lequel, en ta qualité de mari de Ruth, tu réclames un inventaire de la situation commerciale et financière et de la part qui revient à ta femme. Schreiber sera obligé de montrer ses livres à ton mandataire, chose que tu es en droit d’exiger, et de cette façon on verra clair dans ce gâchis. Evidem ment ce sera la brouille entre vous, mais mieux vaut finir ainsi que par la ruiné... Heinz s’assit et se mit à écrire, tandis que Luc dépeçait les perdreaux et se mettait en de voir de leur faire honneur. Heinz, trop surexcité, allait et venait à grands pas, pendant que son beau-frère, après avoir lu la procuration, la serrait dans son porte feuille. -- Ruth, telle que je la connais, ne me par donnera jamais! dit Heinz. — Elle y viendra! répliqua Luc, en regar dant sa montre, et puis il n’y a pas à hésiter, crois-moi. — Toute cette affaire est répugnante, dé clara von Buchen. Suppose que mon interven tion provoque une catastrophe. — Ce n’est pas impossible, mais au .moins vous sauverez quelque chose. — C’est atroce, répéta Heinz. -— Moi aussi j’ai passé par là; avant mon mariage, j’ai traversé lés mêmes alternatives. Mais Ruth se calmera. Erica s’est d’ailleurs con duite admirablement et Ruth fera de même... après avoir payé son apprentissage, s’entend. Parce qu’un individu en a voulu une fois à sa dot, elle s’imagine que l’autre, doit vivre avec elle du parfum des roses et des rayons du so leil. Mais que les affaires tournent mal et tu la verras; elle est la fille d’un commerçant et elle saura défendre bec et ongles le patrimoine de son fils. N’aie pas peur, Heinz, tu agis pour...