Extrait du journal
pin ou le nitrate de soude. Loin de là, la discussion des tarifs étant abandonnée aux hommes spéciaux, la plupart de nos députés en profitent pour chercher un peu de fraîcheur dans la galerie des tombeaux. C’est là que, papiers en main et cigarette à la bouche, on devise des bruits du jour. Et savez-vous quels sont ces bruits ? Eh mon Dieu, rien de moins que le Temps ! Voilà quelques jours qu’on s’aborde eu se demandant ce qui peut bien être arrivé à ce journal. Les uns estiment qu’il a changé de mains, et dé couvrent à des signes certains la pré sence d’une rédaction nouvelle. DIautres déclarent qu’il s’est vendu et, pour un rien, vous diraient à qui et à quel prix. C’est ainsi, du moins, qu’on s’exprime à la gauche de l’Assemblée, là où juste ment notre journal jouissait de quelque estime. Ou y voyait naguère un allié, on y découvre aujourd’hui un transfuge, et naturellement l’indignation est vive. Vous pouvez penser, si \ces accusa tions m’ont ému, et si j’ai eu à coeur de savoir à quoi m’en tenir. J’ai donc été aux informations, et voici, au tant que j’ai pu les recueillir, quelles sont les preuves de notre trahison. À vous de voir s’il ne vaudrait pas mieux confesser tout de suite notre faute et re venir au bercail, là où tant de libéraux éprouvés ont d’avance les bras ouverts pour accueillir des confrères péni tents. Le premier grief qu’on allègue contre nous c’est qu’étant républicains, nous ayons osé jeter le blâme sur la con duite de M. Thiers dans l’affaire des matières premières. M. Thiers, en effet, il faut que vous le sachiez, est devenu pour là gauche une sorte de personne sacrée. Depuis qu’avec une sagesse et une fermeté dout nous l’avons souvent félicité, il a prouvé qu’il mettait son honneur à consolider l’ordre de choses actuel, M. Thiers s’est identifié aux yeux du parti répu blicain avec la république elle-même; il en a pris la majesté, il en a revêtu l’in violabilité, et l’on ne saurait attaquer la sagesse de ses conseils sans faire acte de monarchisme. J’ajoute que ces senti ments de religieux respect augmen tent encore chaque fois que M. Thiers, comme dans les récentes discussions, traite la droite avec quelque rudesse; on croit sentir alors qu’ou le tient mieux, qu’on le possède pour soi tout seul. Dès lors, et la gauche étant dans ces dispo sitions, vous pouvez juger quel scandale nous avons produit dans ses rangs avec notre libre critique de la politi que présidentielle. Nous déplorions le mélange d'obstination, de violence et de finesse avec lequel le président de la république avait peu à peu amené la Chambre à voter des impôts qu’elle avait d’abord repoussés. Nous re grettions de voir l’Assemblée sans cesse placée outre la liberté de ses votes et la crainte de jeter le pays dans une crise eu faisant sortir de la poche de M.Thiers cette démission dont on voit toujours percer un bout. Il nous semblait qu’il ne restait pour l’Assemblée, dans de pa reilles conditions, rien de l'indépendance ni de la dignité dont la représentation nationale ne peut se passer. Enfin, nous ne doutions point que* de pareils sa...
À propos
Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.
En savoir plus Données de classification - thiers
- gladstone
- sabardin
- morin
- situ
- panny
- goethe
- de montesquiou
- pascalis
- tirard
- angleterre
- france
- allemagne
- londres
- brousse
- genève
- irlande
- paris
- stockholm
- dublin
- l'assemblée
- la république
- etat
- parle
- as
- notre république
- parlement
- chambre des communes
- vive la république