Extrait du journal

Quand on a franchi l'altier seuil, sous l'arc d'orée ; visité le cloître carré; con templé la chapelle éventrée et convertie — ô l'ironie des mots! — en grenier à fourrages; quand on a exploré'les coins perdus, pleins de surprises, où la décou verte d'une épitaphe, d'une date,.fait le ver, comme moineaux dans l'herbe d'un cimetière, tout l'essaim des réminiscences; quand on a admiré le puits couvert, dont la rotonde est au centre du cloître rond, d'où les arcades ont disparu, mais duquel les parois survivent, la fermière qui vous guide demande invariablement : — Voulez-vous voir Cazarie? Alors, on s'.aperçoit que tout le pourtour du cercle est perforé, comme une ruche, de petites portes uniformes, régulièrement espacées. C'étaient les cellules des moines. Et en celle-là que marque le n° 61 est née, voici près d'un siècle, mourra, dans l'iso lement et la retraite, ainsi qu'elle a vécu toute sa longue et paisible carrière, demoi selle Cazarie. Ses parents étaient jardiniers du cou vent, lors de la Révolution. Son père — pour qui les religieux avaient été bons — acheta ce coin minuscule, afin de n'être pas loin, lors de leur retour. Il en aida plusieurs à partir, peut-être même leur donna asile en ce débris de leur mo nastère. Et rien ne fut changé, au logis de la Î>énitence, qu'une armoire apportée pour es hardes de la famille et un pétrin plein de farine. Mais les boiseries demeurèrent; la che minée à battants ; les poutrelles où le ver bat les minutes ; la lanterne pour lire au chevet du lit ; la même chaux toute blan che aux murs des deux pièces ; le jardinet plein de violettes et de sain recueillement. Au-dessus, le grenier étend son toit man...