Extrait du journal

Quelle histoire vraiment pour-le jeune président de tribunal que j'étais alors dans une petite ville de province, quelle histoire et quelle imprudence !... Par ma faute aussi et celle de cette maudite en torse qu'en sautant un fossé, à la chasse, je m'étais donnée si maladroitement. Une mauvaise entorse qui n'eu finissait plus de se guérir; rebelle aux soins du docteur Jeannin, le plus ancien médecin de la ville, comme à la science toute neuve du docteur Michel, tout frais émoulu de la Faculté ; une satanée entorse qui me tenait la cheville comme dans l'étreinte d'un piège où je serais resté pris et me permettait à peine de marcher quelques pas en m'aidant d'une canne. Assez, évidemment, pour franchir, sans le secours d'une voiture, le peu de dis tance qui séparait notre maison du palais de justice voisin et pour me rendre à mes fonctions, avec toute mon assiduité si non avec toute ma dignité accoutumées, cette dernière un peu bien compromise par une démarche qui> dans la personne au moins du juge, ne doit rien rappeler des . infirmités traditionnelles que de mauvais plaisants s'évertuent à attribuer à la justice et dont je restais le premier fort humilié... Susceptibilité profession nelle,. délicatesse d'état, qui envenimaient encore le tourment déjà très vif de la gêne physique", de la crainte, au surplus de voir le mal s'invétérer, devenir incu rable. Sa.ns compter mon amour-propre de récent marié., mortifié, comme on pense, en face de. la grâce enjouée de Denise, ma jeune femme, sa pétulance taquine et légéKfl... ' ,.TJne dernière déconvenue, une consul tation, trop précipitée sans doute, d'un spécialiste de Paris, de pàssage dans le pays et restée aussi infructueuse que les précédentes, avait achevé de me découra ger, me laissant sans défense à toutes les suggestions, un peu bien imprudentes, de Denise. Pleine de dévouement, Denise, mais si enfant encore, si étourdie !... Car, tandis que je me lamentais, me répandant en invectives à l'adresse de mes médecins incapables : ' — Le fait est, avait-elle alors lancé sans en avoir l'air, avec une petite moue adorable, qu'à eux tous ilsnesembleatpas en savoir bien long en dépit de leurs études...Toujours est-il qu'ils ne peuvent rien. Et souvent un moins savant... Ainsi Itu n'imagines pas ce que notre vieille bonne, Amélie, m'a conseillé ce matin pour ton entorse"?,,, ~ Ma f«, uqh*...