Extrait du journal

Si cela continue les républicains du Palais-Bourbon vont nommer des commis sions parlementaires pour contrôler et diriger chaque ministère. Les ministres deviendront inutiles. Il y a déjà quelque temps, d’ailleurs, que cette idée révolutionnaire est dans l’air. " En attendant, la Chambre s’amuse à réorganiser à sa manière le personnel du ministère des finances. Elle décide que tel employé sera sup primé, tel autre maintenu ; elle découd, elle taille, elle recoud ; c’est à n’y rien comprendre. Le ministre des finances proteste, d’une voix étranglée ; on l’envoie promener. Le président du conseil est interrogé ; que peut-il dire ? Le personnel des finan ces, ce n’est pas sa spécialité ; c’est l’affaire de son collègue Sadi-Carnot. En somme, dit-il, que la Chambre fasse ce qu’elle voudra. Voilà une nouvelle façon de pratiquer la responsabilité et la solidarité ministé rielles ! Mais cette attitude de M. de Freycinet, si extraordinaire qu’elle paraisse, est la conséquence de ce qu’il a fait la semaine dernière en consentant à passer par toutes les exigences de la commission du budget. Le gâchis s’élargit et s’accentue. Il n’y a plus de gouvernement, il n’y a plus de ministres. C’est la commission du budget qui conçoit et exécute, et le désordre va encore plus loin puisque des députés qui ne sont pas de cette commission prétendent aussi or ganiser et désorganiser le personnel admi nistratif. Quelques-uns, pourtant, persistent à dire que cette bataille n’est en réalité qu’une course au portefeuille, et que M Rouvier et les autres visent tout bêtement la place de M. Sadi-Carnot. Les députés de la majorité, nous le savons, sont en effet plus ambitieux, plus gourmands et plus tripoteurs encore que révolutionnaires ; et il y en a plus d’une douzaine qui vendraient leurs électeurs « pour la forte somme ». Ajoutons que ce qui facilite beaucoup trop ce désordre et encourage la fureur indisciplinable des prétendants aux porte feuilles, c’est la faiblesse du cabinet actuel dont le chef est le premier à lâcher pied devant des attaques qui se répètent tous les jours. Ce n’est plus la Chambre qui accorde sa...