Extrait du journal

DES FEMMES J’ai rencontré l’autre jour une jeune Parisienne ; elle partait pour le Japon. L’année dernière, elle était allée en Afrique, non pas en Algérie, mais en Afrique. Là où il y a encore des nègres, des lions et des cataractes. Les lointains voyages lui semblaient les plus simples du monde, et celles qui pensent comme elle, aujourd’hui, sont innombrables. Vous êtes dans un salon, on parle théâtre, roman, politique, beau temps, et quelqu’un demande : « Estce que vous quittez Paris ? » Les hommes répondent qu’ils passeront quelques jours chez etc., à la campagne, ou peut-être tyi’ils pousseront jusqu’en Italie. Mais une jeune renne, charmante, frêle, blonde, a dit, avec l’air le plus naturel, connue s’il s’agissait d’une promenade à Bougival ou à Suresnes : « Moi, je vais en Chine », ou bien 11 moi, je vais au Brésil ». Les hommes se récrient ; comment, elle, sans qui on ne conçoit pas Paris et qui est aussi nécessaire à la beauté de Paris que Paris à la sienne, elle, à qui il faut les salles de spectacle, les dîners en ville, les thés, les visites, maintenant elle va partir si loin et si longtemps ! On la regarde avec étonnement, car les voyages aux autres continents nous paraissent encore des actions extraordinaires ; elle seule n’est pas étonnée....