Extrait du journal

Devant le formidable courant d'opinion qui se dessinait 1en faveur des détenus de Corbeil, le gouvernement a reculé. Une ordonnance de non-lieu est rendue au profit des militants incarcérés depuis trois mois. La laborieuse instruction de M. Régismanset n'a pu démontrer qu'une chose: l'innocence de nos camarades. Ei alors, on se demande en vertu de quel abus monstrueux de pouvoir il est permis à un homme de détenir d'autres hommes en prison pendant des jours ei des mois sous une inculpation oui ne tient pas debout. Ainsi, pendant quatre-vingt dix jours, on détient dans une geôle des citoyens qu'on projette d’envoyer au bagne, et quand on s'aperçoit que le morceau est si gros qu’il risque de ne pas passer, on les rend a la liberté et le tour est joué. J'écrivais, au début de cette affaire, que les poursuites ne pourraient avoir lieu, faute de base, mais que le Gouvernement tiendrait les membres du Comité confédé ral à l'ombre jusqu'au Congrès de Mar seille. Ma prévision s'est réalisée. Seulement, si nos dirigeants pensaient porter ainsi atteinte au Congrès de la Con fédération, ils sc sont trompés, puisque — de l avis de tous les syndicalistes au sens propre du mot — la tendance la plus avan cée aurait fait un pas en avant, notamment sur la question de l’antimilitarisme, N ici écrivait avant hier dans /‘Humanité que le statut syndicaliste d'Amiens avait été compromis au Congrès de Marseille. Il ne l’eut sans doute pas été si certains des emprisonnés eussent pu faire entendre leurs voix. Cela prouve encore une fois que « le mieux es>l souvent l’ennemi du bien ». Le Gouvernement a donc commis deux sottises. D’abord, en détenant pendant de longs jours, sans aucun motif, d'honnêtes citoyens; d’anire part, en incitant la C. G. T. à faire des affirmations qu'il re doute, et qu'il provoque par ses mesures imbéciles. Henri LAUDIER....