Extrait du journal

Le moins qu'on puisse dire est que notre époque est bien tourmentée. Elle est évidem ment secouée dans ses profondeurs. Elle ne pa raît pas d ailleurs avoir une morale très ferme. Il se pourrait qu’elle n'eût plus de morale du tout. Elle finira sans doute par s apercevoir que cela lui manque. Elle n’est pas pressée de faire cette décou verte. , C'est encore une de ses faiblesses qu elle aurait tort de prendre pour une force. Mais est-ce que les écrivains n’ont pas une responsabilité dans le désarroi général ? D une façon générale les écrivains se flattent d exer cer une influence appréciable, directement ou indirectement, sur I évolution des mœurs, et même sur l’évolution des idées. Comme nul ne voudra accuser les écrivains d enseigner aux foules le mépris de ces préceptes de morale qui donnent un sens à la vie, et protègent tout au moins les plus simples citoyens contre les man dats d’amener du juge d’instruction de Bayon ne, il faut donc que l’influence des écrivains ait beaucoup baissé depuis les âges heureux où elle se croyait prépondérante. 11 faut aussi que les écrivains aient un peu perdu le sentiment de leur rôle, ou de ce qui constitue un de leurs rôles. Cela n’est pas impossible non plus. Et plusieurs d entre eux refusent de connaî tre la leçon des événements et ne manifestent pas la moindre intention d’aller au peuple. Ils ne tiennent peut-être pas davantage à ce que le peuple vienne à eux. Commune, revue de 1 Association des Ecri vains et Artistes révolutionnaires,s’est préoccupée de la question, et elle a demandé à divers écri vains dont les uns ont plus de talent qu’on ne le pense, et dont les autres en ont moins qu’ils ne l’imaginent :...