Extrait du journal

SEPT gares — je néglige aujourd'hui celles de marchandises, ces éte.ndues noirâtres, ces déserts animés, métalliques et poussiéreux de La Chapelle, de Reuilly. des Batignolles, de Vaugirard, je ne m'intéresse qu'à l'humain — sept gares entrent dans Paris comme sept couteaux de fer et de fumée à escar- billes, de grondements sous des vitrages. Elles viennent des points cardinaux et de leurs composés. Elles se fichent au coeur ou à l'épiderme de la ville ; elles aboutissent et ne communiquent pas, ne se rejoignent jamais ; l'épais tissu citadin les arrête, engourdit leur élan et le noie. Leur faisceau de rails se heurtent à sept butoirs de maisons, de foules, d'entassement de pierres et de cohues. Aucune liaison entre eux. sauf à l'extérieur, par de lâches ceintures et, à l'intérieur, par les métros, ces égouts .de la circulation et du voyage achevé, où les déchets' du vagabondage et de la vitesse s'engouffrent, se divisent et s'éliminent enfin à la surface, en gouttelettes dispersées. Paris ressemble à une énorme tumeur grouillante ; les bistouris s'y émoussent et s'y enlisent. Paris ne se traverse pas. On le ^ contourne de loin ou on s'y implante, on l'évite ou on s'y perd à jamais....