Extrait du journal

La Fédération socialiste du Cher, par la résolution qu'elle a votée dimanche, a apporté un précieux élément à la discussion qui se poursuit depuis quelques mois avec plus ou moins de bonne foi au sujet de l'attitude du Parti socialiste aux élections prochaines. S'il ne s'agissait que des craintes bruyamment affichées par certains qui n'ont essayé de- briser l'unité du socialisme français et qui n'ont feint de nous croire capables de compromissions avec la réaction, qu'en vue de mériter les récompenses du ministère Rouvier et de décrocher tel ou tel proconsulat colonial, il n'y aurait vraiment pas lieu de s'y arrêter. Uopinion, même là où elle avait pu être surprise et égarée par les déclamations hypocrites et par les calomnies systématiques die ces politiciens pressés, a bien vite fait 'de se reprendre et de démêler l'intrigue', sous le coup de pareilles opérations. Il n'en demeure pas moins qu'un certain nombre de démocrates sincères persistent à redouter je ne sais quelles trames obscures et à s'imaginer que le Parti socialiste va délibérément faire le jeu de l'ennemi et former l'appoint de majofîtés antirépublicaines, là où il ne pourrait pas enlever la victoire pour luimême, à l'aide de ces coalitions immorales. J'éprouve sans doute quelque humiliation à penser qu'il puisse y avoir des esprits assez peu' initiés à l'histoire, aux principes, à l'état d'âme du socialisme français, pour nourrir sérieusement de pareilles inquiétudes. Le prolétariat socialiste aurait parfaitement le droit de refuser de répondre1 aux sommations insolentes et absurdes qui lui intiment l'ordre de prouver son républicanisme et de démontrer sa haine de la réaction. En vérité, il a payé assez cher le droit de dédaigner de pareilles accusations. Il l'a payé au prix de tout le sang qu'il a versé depuis plus d'un siècle po-ur la conquête et la défense* d© libertés dont il n'a: pas toujours obtenu sa part, pour rétablissement et le maintien d'une République qui a parfois semblé plus soucieuse de> garantir le privilège bourgeois que de tenir les promesses sociales de son principe. Et sans remonter bien loin ̃ dans notre histoire1, chaque fois que la forme républicaine a paru menacée en ce pays de France depuis trente ans, chaque fois qu'a éclaté une de ces crises troubles qui ne sont dangereuses .,que parce que la faillite des engagements et des programmes républicains sème le découragement, la désillusion et le scepticisme politique dans les masses, à l'ordre moral, au boulangisme, lors du renouveau nationaliste, qui donc s'est levé, qui donc s'est jeté au premier rang dans la bataille, qui donc a sauvé la République, si ce n'est cette avant-garde du prolétariat conscient et organisé qui s'appelle le Parti socialiste ?...