Extrait du journal

Le moraliste et l’historien peuvent, certes, goûter, à l’étude des sociétés défuntes, de profondes jouissances en découvrant que les hommes ne varient guère et que les mobiles qui les font agir ne changent pas davantage, mais il n’en demeure pas moins que toute la connaissance que nous pouvons acquérir du passé ne nous apprend rien sur le présent ni, à plus forte raison, sur l’avenir. Il est faux , semble-t-il . que l’Histoire se recommence, et il apparaît plus juste de la comparer au fleuve dont parle le poète grec, fleuve dont les flots renouvelés sans arrêt vont se perdre dans l’infini de la mer, de telle sorte que jamais « on ne se baigne deux fois » dans le même fleuve ». Il est donc à peu près impossible de tirer des leçons de l’Histoire et d’en formuler les lois. L’étude la plus minutieuse et la plus exacte de la constitution d’un peuple mort ne doit nous apporter aucune indication formelle qui nous permette de traiter un peuple vivant constitué de semblable façon....