Extrait du journal

Le budget qui intéresse le plus grand nombre de Français est bien celui de VAgriculture. Les quatre dixièmes de la population totale de la France sont exclusivement rurales : la France est la terre classique du paysan, le pays par excellence de la petite démo cratie rurale. Le budget des paysans devrait donc, logiquement, etre le plus important de tous, le mieux doté. Malheureuse ment il est loin d’en être ainsi. Sur les quatre milliards que l’Etat deman de annuellement aux contribuables, 45 millions à peine sont consacrés à l’A griculture, soit 1,1 0/0 seulement, y La faiblesse de ces chiffres apparaît d’une façon bien plus frappante si on leur oppose l’importance des sa crifices demandés aux agriculteurs. Dans son rapport sur le budget de l’Agriculture de 1905, M. Klotz a mon tré qu’à côté des impôts directs et indirects qui les frappent au même litre que tous les citoyens, les cultiva teurs supportent en outre des charges spéciales si élevées que chacun d’eux paye 47 francs en moyenne, de plus par an, que les autres contribuables. La terre paye 43 0/0 de son revenu, tandis que les valeurs mobilières ne supportent que 11 0/0. La vente de la terre coûte trois fois plus qu’une vente mobilière quelconque. M. Fernand David, dans son rap port sur le budget de cette année, a montré combien cette situation était préjudiciable à ceux qui constituent le fonds même de notre démocratie, et il a exposé ses craintes de voir, si rien ne vient modifier l’état de choses actuel, cette démocratie finira par dis paraître peu à peu. En présence de la concurrence in ternationale, devant l’accroissement prodigieux des moyens de transport, l’augmentation des prix de revient, la diminution des prix du gros, la cherté sans cesse croissante de la vie, les cul tivateurs ne peuvent, en effet, soutenir la lutte qu’en augmentant leurs mé diocres rendements actuels. Mais pour cela, il faut augmenter le prix de revient : employer des machines, acheter des engrais plus actifs, ac croître la puissance productive du sol par des travaux d’amélioration et de transformation ; il faut faire à la terre des avances de capitaux de plus en plus importantes : il faut en quel que sorte industrialiser la culture. Cela est relativement facile pour le grand propriétaire : « Offrant un gage sérieux, il trouve à bon compte les...