Extrait du journal

en 3 actes de M. Maurice Vaucalre. Tout s’apaise. Il fallait s’y attendre. Du moment que les jeunes saltimbanques, meneurs campagne, finissaient par comprendre qu’il pourrait leur en cuire personnellement, il était bien certain qu’ils mettraient une sourdine à leurs bruyantes indignations et que, cessant d’attiser le feu, l’incendie s’éteindrait aussitôt. Ces plaisants personnages n’aiment pas beaucoup à exposer leur précieuse personne. Juger, critiquer, (ce qui, pour eux, veut dire blâmer) vilipender les uns et les autres, se donner des airs de compétence en déblatérant contre tout, prendre des airs lassés, blasés, dégoûtés, tenir en leur loge salon de déminage et de brosserie, c’est leur fort, Adopter des opinions toutes faites, c’est à dire prendre lecontrepied de tout ce qui été admis jusqu’ici, ce qui est d’une naïvetéaussi grande et d’un snobisme aussi ridicule, se poser en réformateur et faire la joie des petites chapelles privées où l’on célèbre en hymnes de galimatias triple les génies méconnus et les incompréhensibles étrivassiers, c’est la mission pour laquelle ils se figurent être élus par droit divin... Le plus triste de l’aventure, c’est qu’ils finissent par, faire illusion et que le tout petit public de Panurge qui ne demande qu’à s’enrégimenter, leur emboîte le pas et fait chorus avec eux ; la couardise universelle leur attire de nombreux partisans et cette troupe comico-hystérique fait tapage et lance des ukases... Il est vrai que tout ceci ne dure guère et qu’au bout de très peu de temps leur sottise montre le bout de l’oreille. Alors, tout change et un beau soir eux et leur suite ils disparaissent sans laisser de trace, comète désagrégée qui ne tarde pas à s’évaporer, à se volatiliser. Mais qu’importe ! Pendant quelbues années ils ont brillé, ils ont été sinon quelqu’un, du moins quelque chose, et cela leur suffit. Au fond leur ambition est modeste, et rien ne serait plus simple que de les laisser la saisi faire, si pendant leurs quelques heures...