Extrait du journal

gestes — connue lorsque s’élève, dans notre temple, une prière collective. Les premières impressions demeurent les plus profondes parce qu’elles ont marqué une conscience neuve. Lors qu’on entend pour la première fois sif fler l’obus qui se précipite avec un bruit Je moteur, on est secoué par un frisson virginal d’initiation. Le premier mort aperçu, encastré dans la glaise d’un pa rapet, est celui qui émeut le plus. La premier appel du blessé qu’on ne sait comment relever est le plus déchirant. Mais, surtout, le souvenir du premier adieu de votre mère dont le baiser, au départ pour le voyage incertain, avait quelque chose d’inhumain à la fois et de religieux, vous trouble et vous révolte encore... Mais il faut renouer le fil de la vie présente. Il n’est point légitime que nous tirions quel«]ue vanité* d’avoir vécu des minutes historiques, en faisant cha cun notre devoir à notre place. A défi nir les parties de la symphonie héroïque, l’ancien combattant s’aperçoit qu'il est mûri, vieilli. Mais nos fils sont là qui nous poussent, nous avons conquis le droit de préserver à la fois les libertés françaises et la flamme d’Israël et noue prions que nos enfants continuent dan» la paix à suivre l'éternel chemin. Nous avons jadis agi dans la fièvre, «lans la boue et dans le sang. Mais nous aurons su nous élever au-dessus des haines éphémères. Notre génération a atteint les limites du suprême sacrifice. Quoi qu’il arrive, sous le ciel harmonieux de notre pays, nous ne pourrons jamais rien regretter, car nous avons goûté l’austère volupté de la soumission et du devoir accompli en pleine conscience. Raymond-Raoul Lsmrebt....