Extrait du journal

•Dans la journée, Simon fut conduit 'devant Pilate. Le gouverneur était ex ténué : une ride profonde barrait son front, ses grands yeux noirs clignaient de lassitude et d'insomnie. Il appuyait •mollement au bras du siège un coude fatigué et la main fiévreuse soutenait .une tête plus fatiguée encore : ( —Ton nom ? fit-il sèchement. — Simon de Cyrène... Mon père est le Romain Rufus. Pilate tressaillit. Passe encore que le Nazaréen eût trouvé de 'là pitié parmi les femmes juives et que l'une d'elles eût essuyé de son voile la face du con damné. Mais un homme... un Romain... le fils de Rufus ! Pilate n'en revenait point : — Et lu n'as pas honte d'avoir ainsi compromis ton nom et le nom de Rome dans cette folie ? Simon était calme comme un marbre cte statue. Pas une fibre ne bougeait sur son visage pâle. Il fixa Pi'late : ■ — Seigneur, notre droit dit que le malheureux est une chose sacrée. J'ai fait mon devoir de Romain en assistant un malheureux. * — Mais tu bravais la justice du pré toire. — Non... Pas la justice du prétoire, seigneur, car on assure que vous avez dit : Je ne trouve point de crime en cet homme. i Pilate pinça les lèvres. Le rappel de sa lâcheté lui remit un peu de sang au visage. Il eut un geste d'impatience : — Prends garde, Simon ! Mes licteurs ne sont pas loin. — Seigneur, je ne crains point les licteurs. Depuis hier, il me semble que je sais comment on souffre et comment on meurt pour la Vérité. — La Vérité !... qu'est-ce que c'est que ça ?'fit Pilate avec un sourire de scep-...