Extrait du journal

tendre le Prophète. Car j’aime beaucoup la mu sique. — Ah ! oui, fit l’homme marié, j’ai vu ça. C'est bien beau, surtout la bénédiction des poignards du quatrième acte. Mais l’air de table, je ne m’en souviens pas, d’autant plus que le cinquième acte se passe dans un cimetière. — Eh bien ! monsieur, je vais vous rendre le service de vous expliquer la pièce, dit M. Salomon avec un grand sérieux, bien qu’il s’aperçut que le voyageur prenait un opéra pour un autre. Le pre mier acte se passe à Constance, et aux premières notes on pressent déjà la Saint-Barthélemy. Mais le prochain tiurnoi qui va avoir Heu à Païenne... Après tout, ce serait trop long, je préfère vous chanter l'air de l’orgie du cinquième acte. : Et monsieur Salomon, après avoir toussé deux fois avec le sang-froid imperturbable des vrais co miques entonna la légende du sir de Franc-Boisy. — Tiens ! c’est drôle, fit le monsieur. Oui, c’est bien ça, tu te souviens, ma femme, cet orgue qui venait le matin, eh bien 1 il jouait cela. M. Salomon, encouragé par le rire de son ami et par l’ébahissement des Espagnols arrêtés dans le cours de leurs cigarettes pour l’écouter, continua à pleine voix ce chant populaire. Mais toutes ces distractions n’arrètaient pas le convoi, et l’on entra dans Orléans. Le vicomte et son étrange camarade de voyage se dirigèrent vers le buffet où la foule se portait en masse pour souper. C’est à peine s’ils purent trou ver place, Enfin, lorsqu’ils furent assis, M. Salo mon d’une voix pleine et forte, appela un des gar çons qui ne savait à qui répondre. Dominé par ce timbre impérieux et sonore, un de ces jeunes hom mes frisés se porta à la hâte et tout empressé vers notre impatient personnage. — Que faut-il vous servir, monsieur ? Plssieurs voyageurs timides et par. cette raison même inquiets que le train ne partit sans eux, at tendaient haletants que ce garçon fût libre. — Garçon êtes-vous pressé T — Oh l oui, monsieur, fit celui-ci avec convie» tion. z...