PRÉCÉDENT

Mémorial de la Loire et de la Haute-Loire, 7 mars 1892

SUIVANT

URL invalide

Mémorial de la Loire et de la Haute-Loire
7 mars 1892


Extrait du journal

LETTRE_DE PARIS La crise. — Un ministère qui tombe. — L’amour du portefeuille. — Comment on fait un ministère. — Retour à la réalité. Paris, 5 mars. — Eh bien 1 voilà cetto crise terminée 1 Quel est votre avis sur le nouveau minis tère ? Venez un instant prendre un bock, : nous causerons politique. Le gros homme qui m’interpellait de la sorte ne me laissa pas le temps de placer une réponse et m’entraîna au café. Là, après s’être assis devant un verre de bière, il prit la parole, et la conserva jusqu'à la fin. Je vais essayer de vous reconstituer ce récit comme un tableau des mœurs parlementaires dans ces dernières années. — La crise, cher monsieur, vous no sau riez croire ce que ce mot résonne au cœur d’un député. Lorsqu’on a un ministère en face de soi, vivant et parlant, on hésite à lui ravir l’existence. Mais une fois qu’on est parti en guerre, on ne s’arrête plus et un Cabinet est bien vite renversé. Hélas ! que j’en ai vu tomber de ministères I comme aurait pu dire Victor Hugo, qui, no l’oubliez pas, est mort sénateur. Mais je reviens à mon idée et je vous af firme que rien ne cause émotion plus étrange chez un député que la chute d’un Cabinet. Chacun se dit à part soi — tout au moins parmi les membres de la majo rité : Ce sera peut-être mon tour 1 et cha cun peut espérer quelque jour qu’il sera le ministre du lendemain. Moi aussi, j’ai passé par ces espérances et par ces angoisses. Lorsque je siégeais à la Chambre, je ne me comportais pas plus mal qu’un autre. En dix années, j’ai pris dix fois la parole, sans éclat, il est vrai ; on ne m’a jamais écouté ; je n’avais pas d’autorité. Dites-moi un peu pourquoi ! quand je montais à la tribune, la salle se vidait ; quand on me répondait, elle se remplissait. Un vrai mouvement de piston. Lorsque survint la première criqp à la quelle je pris part, je me dis à part moi : Peut-être serai-je du nouveau ministère. J’avais voté pour le cabinet tombé. On choisit les nouveaux ministres, suivant l’usage parlementaire, parmi ceux qui avaient provoqué la crise. Je m’expliquai alors pourquoi le nouveau président du Conseil ne m'avait pas demandé ma col laboration. Arriva la seconde crise.Cette fois j’étais parmi les adversaires du Cabinet. Je me flattais d’être de l’opposition. Ne trouvezvous pas que cela vous a un certain air do crânerie : être de l’opposition ? Et puis je me disais in pet to : Cette fois, peutêtre serai-je de la future combinaison. Hélas! vain espoir. Les membres du nouveau Cabinet, contrairement à ce qui s’était passé la fois précédente, furent pris parmi la minorité qui avait voté avec le Cabinet tombé I Je n’y comprenais plus rien. Mais je résolus de tenter un grand coup. Justement une occasion se présentait pour moi d’affirmer ma présènee, ma vi talité et mes tendances. Le ministère avait provoqué bien des rancunes, éveillé bien des soupçons. Bref, on le tolérait, mais ou sentait que ce ne serait pas long. Je déposai une demande d’interpellation sur les retards apportés au dépôt d’un projet de loi d’intérêt local intéressant mon département....

À propos

Fondé en 1845, le Mémorial judiciaire de la Loire est, comme son nom l’indique, un journal judiciaire. D’abord hebdomadaire puis quotidien, il est rebaptisé L’Avenir républicain en 1848, puis L’Industrie en 1852, puis le Mémorial de la Loire et de la Haute-Loire en 1854, nom qu’il raccourcit quelques quatre-vingt-ans plus tard en Le Mémorial. Collaborationniste, le journal est interdit en 1944.

En savoir plus
Données de classification
  • pfau
  • cetto
  • rozel
  • année
  • leniel
  • martel
  • auretti
  • ludwig pfau
  • lujo brentano
  • théo lier
  • france
  • allemagne
  • alsace
  • alsace-lorraine
  • empire allemand
  • tonkin
  • saint-étienne
  • paris
  • chambre
  • angers
  • havas
  • société des agriculteurs de france