Extrait du journal

L’Attentat. Hier, au moment où il venait d’entrer à la Chambre, M. Jules Ferry a été victime d’un odieux attentat. Un individu nommé Aubcrtin s’est avancé vers lui, et sortant un revolver de sa poche, a tiré trois fois sur le chef de l’Union des gauches. Deux balles ont atteint M. Jules Ferry qui a ôté aussitôt entouré par ses amis et conduit dans un bureau du Palais-Bour bon. Voici dans quelles circonstances cette tentative d’assassinat a été commise. Il était trois heures environ. M. Ferry causait dans la salle des Quatre-Colonnes avec quelques amis, notam ment MM. Reinach, directeur de la Répu blique française, et Cazot, sénateur ; il était question de la formation du cabinet Fallières, lorsque on vint apporter à M. Ferry une carte de visite sur laquelle le nom de M. Hervé, directeur du Soleil, était biffé et remplacé par ces mots : « M. Aubertin vous demande un moment d’entre tien. » M. Ferry quitta ses amis et vint dans la rotonde. Ne connaissant pas la personne qui le de mandait, il se renseigna auprès de M. Ma thieu, chef du service intérieur, qui ne put lui indiquer cet individu, mais qui lui don na le conseil de ne pas aller dans la salle d’attente. M. Ferry s’adressa alors à un huissier, M. Fenioux, qui lui indiqua Aubcrtin. Ce lui-ci, dès que M. Ferry fut près de lui, dit : — J’ai un mémoire à vous remettre, et il tira d’une serviette un papier portant l’en tête du ministère de l’intérieur. M. Ferry le prit et, pour le lire, se plaça obliquement. Aubertin sortit alors de cette même ser viette un revolver nickelé, de petit calibre, et lâcha un premier coup à bout portant dans la région du cœur. Aussitôt une bousculade se produisit. L’assassin tira le second coup plus bas et enfin le 3e coup qui n’atteignit pas M. Ferry. L’arme dévia, la balle vint frapper le par quet où elle a été retrouvée....