Extrait du journal
Cette forme de notre activité nationale qu’est le tourisme est très dure-1 ment éprouvée par la crise et les inquiétudes que manifeste à ce sujet l'opi1 nion publique ne sont que trop justifiées par les statistiques prouvant la , diminution considérable du nombre des touristes venus en France ces der- , nières amiées. Ces statistiques montrent de plus que les Français qui, jus qu’ici, se déplaçaient peu, se sont mis à voyager, car on constate en effet i une augmentation considérable du chiffre de leurs départs. Dès lors, chacun suppute le préjudice causé aux affaires industrielles, commerciales et agricoles par cette raréfaction du nombre des arrivées des étrangers en France et par l’importance des exodes de nos nationaux. LA PERIODE DE PROSPERITE La crise parait particulièrement accusée parce que, aussitôt la guerre ter minée, nous avons connu une situation fort avantageuse, un terrible et poi gnant attrait étant venu s’ajouter, hélas, aux riantes parures de notre sol. Avant 1914, on venait en France pour goûter le charme et la noblesse de ses décors naturels, la grâce aimable de son ciel, la beauté séculaire de ses édifices, la forme optimiste du caractère français et on venait aussi dans notre pays prendre des leçons de bonne humeur, afin d’oublier ses propres soucis dans un pays où tout n'était que sourire. Après la guerre, on vint chez nous pour admirer autre chose que de la grâce et du charme ; nos visiteurs savaient qu'en passant nos frontières ils entraient dans un pays affreusement endeuillé, qu'ils verraient écrit sur la terre le témoignage de notre souffrance avec les traces de notre vail lance : la France n’était plus seulement le radieux musée des merveilles, elle était devenue le panthéon des plus hautes vertus civiques. Paris fut dès lors, durant quelques années, le point de rencontre des touristes mondiaux, puis, ces dernieres années, la curiosité des étrangers s’at ténua, en même temps que des pays concurrents, comprenant les immenses i avantages que comporte la pratique du tourisme, s'organisaient pour atti rer des visiteurs, venant jusque dans notre capitale chercher les clients né cessaires à leur prospérité, comme on peut en juger par la création sur nos ( boulevards de leurs offices. LIMITATION DES AUTRES PAYS Des nations beaucoup moins favorisées que la nôtre par les libéralités de 1 la nature s’efforcèrent ainsi d'amener à elles la curiosité du voyageur par ( la seule manière qu’elles eurent de lui faire signe et de l'obliger à faire un détour pour les visiter. Elles comprirent que l'art d’attirer les étrangers \ comportait une part de science très positive, et, estimant insuffisant le fait d’ètre belles, avec un tenace acharnement proclamèrent dans toutes < les parties du monde que leur beauté devait être un but de pèlerinage esthé- , tique pour tous ceux qui sont à la recherche de nobles spectacles. C’est le cas de l'Allemagne, qui assez curieusement, en même temps ! qu’elle multiplie les invites aux touristes du monde entier à venir chez elle, rend par des mesures d’interdiction de sortie des capitaux nécessaires aux voyages, pour ses nationaux, le tourisme impossible à pratiquer à l’étran- ( 1 ger. Jusqu'en 1934, en effet, le Reich autorisait l'exportation de 700 Reichs, marks, l'année dernière, la tolérance d'exportation fut fixée à 200 reichs-1 marks, actuellement, elle est réduite à 10 reichsmarks, ce qui fait que les voyages sont à peu près impossibles hors des frontières d’Allemagne pour1 les habitants du Reich, et ces mesures sont prises en même temps que dans nos grandes villes s’ouvrent ses bureaux de renseignements, que sur nos routes s'étalent ses affiches, que dans les hôtels sont distribués ses tracts, ses brochures, ses dépliants, que partout est répété le te leit-motiv » « Visitez l’Allemagne 1 » NOUS NE SAVONS PAS FAIRE NOTRE PUBLICITE Et ce n’est pas seulement l’Allemagne, ce sont tous les autres peuples qui veulent attirer la clientèle des touristes, qui organisent leur publicité. Une percée nouvelle est-elle faite dans une cité étrangère, tous les cinémas du monde montrent la voie créée, tandis que de nouveaux boulevards peu vent être créés à Paris, entraînant la démolition de centaines de vieilles maisons sans que nous en parlions ; on vient de terminer sur la Truyère les plus puissantes usines hydroélectriques du monde ; dans quelques se maines nous aurons en service le plus grand kilométrage de lignes à haute tension et de voies ferrées électrifiées ; nos chantiers maritimes ont équi pé le plus vaste paquebot qui ait jamais fendu les flots de l’Océan ; dans tous les domaines nous pouvons signaler l’importance de nos réalisations, mais nous restons silencieux ; de ces supériorités indiscutables, vérifiables, tangibles, nous ne disons rien, faisant preuve d’une modestie inadmissi ble en face du tintamarre de nos rivaux. ENFIN VA-T-ON FAIRE UN TRAVAIL SERIEUX ? H faut que nous nous rendions compte que si nous voulons garder notre primauté historique, nous devons faire connaître les raisons pour les étran gers de venir en France et en même temps nous préoccuper d’organiser notre pays pour le contentement des visiteurs qui seront, rentrés chez eux, nos meilleurs agents de publicité. C’est là le programme de M. Roland Marcel, commissaire général au Tourisme ; les éminentes qualités qu’il a montrées dans les postes qu’il a occupés jusau’ici nous sont bien un sûr garant qu’il saura mener à bien la tâche que le Gouvernement lui a assignée, et tous ceux, que la crise qui frappe le tourisme français alarme, peuvent avoir confiance en lui. Antoine BORREL, Sénateur de la Savoie....
À propos
Fondé en 1845, le Mémorial judiciaire de la Loire est, comme son nom l’indique, un journal judiciaire. D’abord hebdomadaire puis quotidien, il est rebaptisé L’Avenir républicain en 1848, puis L’Industrie en 1852, puis le Mémorial de la Loire et de la Haute-Loire en 1854, nom qu’il raccourcit quelques quatre-vingt-ans plus tard en Le Mémorial. Collaborationniste, le journal est interdit en 1944.
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