Extrait du journal
12 septembre. Lorsque cette causerie passera sous les yeux de nos lecteurs, M. Combes, entouré d’une armée, parlera aux Bretons ; a l’abri des baïonnettes au bout des fusils chargés, le terrible et tremblant fantoche fera de grands gestes et affirmera, une fois de plus, son ferme propos de tout détruire dans cette Bretagne qui persiste à conserver sa foi reli gieuse. Combes nous représente bien ces farou ches délégués de la Convention qui n’osaient se hasarder eu Vendée et en Bretagne qu’en tourés de soldats, précédés de canons et met taient tout à feu et à sang sur leur passage. Les officiers et les soldats de la Révolution méprisaient ces horribles bourreaux qu’ils étaient chargés de protéger contre les justes colères des paysans pillés, contre les parents des chouans fusillés. Combes n’est pas plus brave ; il est aussi bavard et aussi cruel ; il n’hésiterait pas à faire massacrer quelques Bretons pour son propre plaisir. Que pensez-vous d’un chef du pouvoir, du premier ministre d’un gouvernement, aj’ant peur de se montrer à son peuple et déplaçant deux mille soldats pour entourer sa voiture ; les Bretons, tous courageux, ne cachent pas leur dégoût pour cet homme amenant avec lui autant de militaires qu'il y a d'habitants dé sarmés dans la ville. Un autre sectaire. Tailhade, a dû se faire protéger contre les Bretons qu’il insultait de puis si longtemps ; il a fait, lui aussi, appel à l’armée qu’il injurie tous les jours, pour dé fendre sa précieuse personne et il demande, aujourd’hui, qu’on traite comme des assas sins les quelques centaines de braves gars bretons qui l’ont hué et lui ont jeté des pierres. Combes et Tailhade peuvent se donner la main, ils sont aussi ridicules l’un que l’antre et, comme ils ont peur, ils accusent les Bre tons de n’étre pas Français ; pour ces deux grotesques du jour, être Français signifie être le plat valet de Combes et des sectaires : mais qui est patriote et religieux, n'est pas Fran çais. Laissons Combes ; nous lirons plus tard ion discours que, sauf les amis invités, les Apache» ministériels et les camelots, per sonne n’entendra. Le chef du pouvoir parlera de la bonté, de la générosité du gouvernement qui ne veut te bien de chrcun, celui des moines sur tout, — on le sait — et il le veut avec tant d’âpreté, ce bien-là, qu’il en dépouille ses pos sesseurs. L’autre jour, dans un quartier du centre, j’ai vu quelques enseignes très amusantes, à cause des rapprochements d’idées qu’elles contenaient ; l’une était celle « d'un cabinet d’affaires, avances et prêts, contentieux » et, à côté, sur le même plan, le mot dentiste étincelait. L’autre : « Affaires litigieuses, liquidations, successions > et au-dessous : « Souricière perfectionnée ». 11 y en avait d’autres tout aussi suggestives ; je me suis demandé un instant si j’étais dans le quartier du minis tère et si les hommes d’affaire et dentistes, les liquidateurs et les fabricants de souri cières perfectionnées, n’allaient pas m’appa raître sous la forme, peu séduisante, des Combe», Trouillot, Pelletan et Cie. Et c’est à croire que les Bretons se méfie ront des souricières et des dentistes officiels, et ils feront bien. Tout le monde est aux champs ; les châ teaux sont pleins d’animation, les fêtes s’y succèdent : les chasses mettent en fièvre les hommes et les bêtes ; on villégiature suivant •es goûts et ses moyens ; la famille Humbert s’est conformée aux usages exigeant que l’on quitte Paris pour la campagne, à une certaine époque de l’année. Elle a choisi cette fois le beau château de Fresnes-lea-Rungis, pas très loin de la capi tale, dans un site charmant et verdoyant. Cela ne vaut pas peut-être Celleyran ou les Vives-Eaux, mais c'est confortable pourtant et en très bon air. Les chambres de cette prison — j’avais oublié de dire que Fresnes est une prison — sont vastes, hautes de plafond, avec de gran des fenêtres ; le mobilier y est suffisant : bon lit, table de toilette, bibliothèque, rien ne manque du nécessaire et même du superflu. Les prisonniers ont des promenades agréa bles dans les larges cours et dans les jardins ; la nourriture y est abondante, saine et va riée ; c’est une prison où il fait bon vivre, à l’abri des intempéries du temps et du sort. On y fait des conférences, de la musique, on y joue des pièces de théâtre ; bref les invités du directeur n'ont presque rien à envier aux invités des châtelains hospitaliers. Et puis, ajoutez à cela aucun ennui, aucune dépense que celle que l’on veut absolument faire : pas de toilettes coûteuses, tout pour rien. Lorsque j’ai visité cette prison, j’ai com-, pris tout de suite l’empressement si naturel des mauvais drôles de s’y faire admettre, et combien c’est facile 1 un petit vol par ci, un petit coup de couteau par là et les portes ••'ouvrent toutes grandes. Notre gouvernement a surtout perfectionné les prisons, c’est une justice à lui rendre. Les honnêtes ouvriers attendent toujours la poule au pot, la retraite, le bien être pour leurs vieux jours, des logis spacieux et hygiéni ques ; ils attendront tout cela longtemps et si, comme dit un philosophe, ce que l’on désire a seul du prix, ce que l’on possède n'en a plus, les ouvriers doivent être heureux puisqu’ils n’ont encore rien obtenu de ce qu’ils espé raient, rien de ce que les socialistes leur ont tant de fois promis. Mais ce qu’on possède a, je le crois, tout de même de la valeur et les Apaches se réjouis sent grandement de tout ce que ce gouverne ment paternel a fait pour eux ; aussi, lui en •ont-ils reconnaissants et cette reconnais sance, ils la lui témoignent en toute occasion •n criant : Vive Combes, à bas la calotte 1 En y réfléchissant bien, j’approuve nos excel lents ministres, députés et socialistes intran sigeants ; je m’explique parfaitement pour quoi ils ont négligé le sort de l’ouvrier et amélioré le sort des cambrioleurs. Jamais, en effet, un beau parleur révolutionnaire ne sera ouvrier — en admettant même qu’il l’ait japais été, — travailler de ses mains, n'est NMflt wa fait : les délégués mineurs, Iss...
À propos
Fondé en 1845, le Mémorial judiciaire de la Loire est, comme son nom l’indique, un journal judiciaire. D’abord hebdomadaire puis quotidien, il est rebaptisé L’Avenir républicain en 1848, puis L’Industrie en 1852, puis le Mémorial de la Loire et de la Haute-Loire en 1854, nom qu’il raccourcit quelques quatre-vingt-ans plus tard en Le Mémorial. Collaborationniste, le journal est interdit en 1944.
En savoir plus Données de classification - tailhade
- jeannez
- blandan
- djemaa
- dutertre
- sushielle
- maré
- susbiella
- jonnard
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