Extrait du journal
" L'Allemagne paiera " Le président du conseil a eu raison do dire qu’il y a des phrases qu’il s’agit de faire vivre. Ajoutons seulement que cos phrase s-là 11e sont pas uniquement celles du traité de Versailles. Les phrases que prononcent les ministres, celles que le Parlement inscrit dans ses ordres du jour, celles qu’on retrouve chaque jour sous la plume des journalistes, que se répètent les citoyens, et par lesquelles, une fois dites ou redites, on se persuade .volontiers quo les affaires du pays sont réglées, sont bien souvent, elles aussi, ' des phrases qui ne vivent pas encore. Ce ne sont là que des corps inertes où 11’est entré aucun sou file de vie. Quelquefois ce ne sont plus que des phrases mortes, des cadavres de mots dont l’existence a été brève, et dont il faut débarrasser la cité des vivants à moins qu’on ne trouve moyen de les ressusciter. Donnons-en deux à titre d’exemple. u L’Allemagne payera. » Voilà Lien une de ces phrases qui ne vivent pas encore. Elle a suffi depuis longtemps à nous con tenter, et à assurer la tranquillité de notre esprit. Puisque l’Allemagne devait payer, on ne s'inquiétait plus trop de voir les milliards s’accumuler sur les milliards, pour la remise en état de nos départements ravagés, pour les justes pensions à distribuer aux mutilés et aux orphelins de la guerre. C’était la France qui payait d’abord, convaincue qu’elle luisait seulement une avance de fonds à Son débiteur. Budget des dépenses re couvrables, écrivait le Parlement en tète de ce chapitre qui s’allongeait tou jours : après quoi, satisfait d’avoir ainsi en trois mots arrangé les finances, il passait à d’autres soucis ou à de légiti mes loisirs El nous étions satisfaits avec lui. Quand on a dans son portefeuille un bon chèque, de quelque importance, ou ne se tourmente guère de n’avoir plus grand"chose dans son porte-monnaie, ni même d’avoir contracté quelques menues dettes. On ira encaisser le montant du chèque, et le reste sera facilement réglé. Mais voici que l’Allemagne proteste qu'elle 11’a pas provision suffisante pour faire honneur à sa signature. Nous com mençons à nous émouvoir, n’ayant plus entre les mains qu’un chiffon^dc papier. Mais notre déception et noire embarras ne sont pas tels que nous ne nous rac crochions encore à notre espérance et à la déjà vieille phrase consolatrice : «< I."Allemagne payera. » Cette perspec tive est en effet très consolante, à condi tion qu’elle ne soit pas un simple mirage. Pour que l’Allemagne paye, il faut la contraindre, car il est manifeste aux yeux du monde entier qu’elle 11'est qu’un débiteur de mauvaise foi, qui, selon le mot de M. Briand, prépare « une ban queroute frauduleuse », et dissimule son actif, qui est considérable, sous un passif qui est. effroyable. Elle payera si on l’v force, mais qui l’y forcera ? Les puis sances alliées ont assurément ce pouvoir; en ont-elles la volonté ? Il ne semble pas, pour ne tien exagérer, qu’elles soient dis posées ii prendre les mesures fermes, seulement à dire le mot énergique qui ferait sortir le mark or de sa cachette. Nous ferons sans doute tous nos effort*5 peur les persuader d’agir. Est-il néanmoins quelqu’un qui s’at tende de leur part à une action suffi sante ? Alors il ne reste réellement que nous pour obliger l’Allemagne à régler sa dette. Mais par quels moyens ? Voilà le point capital. Aussi longtemps que nous n’aurons pas décidé et déclaré par quels actes nous allons essayer de re couvrer notre créance, la phrase : << L’Al...
À propos
Fondé en 1845, le Mémorial judiciaire de la Loire est, comme son nom l’indique, un journal judiciaire. D’abord hebdomadaire puis quotidien, il est rebaptisé L’Avenir républicain en 1848, puis L’Industrie en 1852, puis le Mémorial de la Loire et de la Haute-Loire en 1854, nom qu’il raccourcit quelques quatre-vingt-ans plus tard en Le Mémorial. Collaborationniste, le journal est interdit en 1944.
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