Extrait du journal

$iltei du matin Monsieur le président, Comme on dit à Agen, ce soir vous ne serez plus dans nos murs : vous aurez pria le chemin des pays Scandinaves. En trois semaines, vous échangerez, avec quatre monarques, quatre toasts sans résultats. C’est très bien et au nom de ceux qui pourraient être mes électeurs, je vous félicite... Je vous félicite et aussi je vous plains. Car, entre nous, vous pouvez bien le reconnaître, ce voyage vous horripile. Il est hérissé de difficul tés et de fatigues ; il est long, il manquera do soleil et de gaieté... La Scandinavie, c’est de l’Ibsen et ce n’est pas tout à fait votre genre. Quant à la Russie, c’est nébuleux, c’est froid, c’est loin — et tout cela ne vaut pas un verre de votre petit vin bu sous la charmille du Loupillon... Vous n’êtes pas fait, Monsieur le président, pour ces représentations à grand spectacle et sans doute vous donneriez tous les galas du monde, les toasts les plus historiques pour une simple chanson à boire chantée à l’unisson par vos amis d’Agen... Mais, que voulez-vous, tout n’est pas rose dans votre métier de chef d’Etat. Mais vous trouvez dans votre liste civile des compensations aux ennuis de votre emploi cons titutionnel. N’importe, la main d’Haakon doit être bien froide et j’imagine que celle de Nico las est brûlante de fièvre... Vous les serrerez — n’est-co pas ? — avec conviction de notre part. Cela n’a d’ailleurs qu'une importance relative. Quand vous allez à Villeneuve-sur-Lot, ce n’est pas pour grand’chose, et quand vous allez à Christiania ou à Stockholm, c’est peut-être bien aussi pour dee prunes. Allons, bon courage... Trois semaines, c’est vite passé, même quand c'est trois semaines de banquets, de discours, d'habit avec la plaque....