Extrait du journal

Un de nos confères a eu l’idée de faire le compte des séances tenues par la nouvelle Chambre et il a constaté que sur cent quatre-vingt-dix-sept jours d’existence qu’elle comptait elle en avait consacré cent vingt-cinq au re pos le plus complet, et soixante-douze seulement au travail, si l’on peut appe ler travail la besogne à laquelle elle se livre. Et voilà les journaux partis en guerre contre ces fainéants de députés qui n’en donnent pas au pays pour son argent et qui s’offrent trop de bon temps. A-t-on raison de reprocher aux dépu tés de ne pas siéger assez souvent et de préférer le repos au travail ? Je me permets de ne point le croire et, au contraire, eu égard à ce qu’est leur tra vail, je leur reprocherai plutôt de four nir un labeur excessif.Et vous entendez bien que si j’avance qu’ils travaillent trop c’est parce que leur travail, ou ce qu’ils appellent leur travail, est tout le contraire d’un travail parlementaire bien compris et véritable. Leur travail, est, en effet, purement négatif et il est parfaitement inutile, oiseux et vain. Travailler, pour eux, c’est se réunir non pour faire des lois ni pour voter le budget, mais pour prononcer des dis cours ou pour en entendre, discours qui, le plus souvent, n’ont d’autre objet réel que de permettre à leur auteur de parler du haut de la tribune. Le plus inintelligent, le plus illettré, le plus borné des députés se tient pour un grand politicien et pour un penseur ; le$ pires bafouiljeurs se considèrent comme possédant au plus haut point le don de l’éloquence. Et c’est pourquoi, en toutes occasions, que le gouverne ment soit interpellé sur sa noïitique ou eur tel de ses actes en particulier ou sur tel incident que la Chambre estime être de son ressort — et pour la Chambre tout est de son ressort — ou que la dis cussion générale soit ouverte sur un...