Extrait du journal

La présente guerre est une guerre politique. Elle a été pré parée méthodiquement par les bureaucrates omnipotents et irresponsables qui gouvernent l’Empire Allemand. Craignaiton à Berlin qu’elle ne fût impopulaire ? Depuis quarante ans, les écoles et les casernes avaient cul tivé le patriotisme exclusif et orgueilleux de la plus grande Allemagne, la discipline aveugle et la dévotion fétichiste à la dynastie des Hohenzollern. Cependant, les réalités de la vie avaient enseigné à un nombre toujours croissant de citoyens qu’il manquait au développement de la puissance matérielle le corollaire de la justice sociale et de la liberté politique. La paix avait accentué les divergences d’aspirations entre gouvernants et gouvernés. Mais une presse et des associations chauvines patronnées par le pouvoir veillaient au grain. On mobilisa l’une et les autres en même te/nps que l’armée et on leur enjoignit de redoubler d’ardeur. Les succès militaires, qu’on escomptait rapides et décisifs, aideraient, espérait-on, à retrouver l’élan populaire et l’union nationale de 1870. Le mot d’ordre de cette propagande était prêt d’avance : nos rivaux se sont coalisés pour étouffer le libre développement de la patrie allemande ; ils l’ont attaquée ; elle se défend. Aussi, lorsque l’empereur appela son peuple aux armes en déclarant « qu’il ne connaissait plus de partis, qu’il ne connais sait que des Allemands », la propagande intérieure eut-elle beau jeu. L’Allemagne partit en guerre hypnotisée, enthou3?...